Enterrés vivants.

En plusieurs dizaines d'heures, Alan Ball crée un film dense mais passionnant, une série qui voit ses personnages évoluer sans cadre, contour typique des productions actuelles. Ici, les saisons se complètent, elles ne sont comparent pas ; le fleuve suit son cours, jamais les personnages n'oublient ce qu'ils ont pu faire, voir, vivre ou sentir. Du premier au dernier épisode, Six Feet Under c'est voir le temps faire son oeuvre sur une famille américaine, apprécier son évolution, observer ses grands moments comme les plus petits instants pour comprendre les réactions de chacun, ce qu'ils finissent tous par devenir, jusqu'à ce que la mort les sépare.

Parfois drôle, souvent divertissant, ce qu'il se passe sous le toit de Fisher & Sons, l'entreprise familiale, ne cessera d'intéresser les curieux, ceux qui gravent dans leur mémoire les scènes les plus anodines pour découvrir l'épisode d'après, ou deux saisons plus tard, le véritable sens du moment, ses répercussions sur le court, le moyen, le long terme avec surprise et admiration. La qualifier de film ne suffirait pas, l'élever au rang de film d'auteur serait plus juste : l'écriture, sans fausse note, est d'un plaisir à découvrir. Avec une maîtrise de la logique sans faille, Six Feet Under s'impose comme une oeuvre majeure parmi celles qui traitent du destin.

Six Feet Under ne se contente pas d'un casting, d'une famille ou de son entourage, il y a un monde autour d'eux, un univers qui ne cesse d'exister. La série, avec soin, fait vivre son second plan avec autant d'attention que le premier : je les imagine rangés dans un placard, ces acteurs que l'on a croisé une fois, parce que l'un a prêté un tournevis à l'autre, et que l'on reverra deux saisons plus tard, parce que l'outil n'a pas été rendu. Il n'y a pas de guest, on pourrait être tenté de dire qu'il n'y a pas d'acteurs, que seuls les personnages comptent, leur intérêt à apparaître au moment donné, pour la scène donnée, sans aucune autre considération.