Alors que Broadchurch jetait des rayons de soleil qui recouvraient la noirceur d’un crime, Southcliffe prend le versant monotone et froid qui se réveille violemment suite à des coups de feu matinaux d’un tireur déséquilibré. Ambiance…
Caractérisée par un concept naturaliste cher à la littérature, Southcliffe livre à l’état brut les dommages collatéraux imposés aux individus qui ne peuvent plus mener une existence normale. Tous au bord du gouffre qui s’élargit à chacune de leurs actions défiant la raison (Paul « kidnappe » sa nièce, Claire se met en tête de sauver coûte que coûte une connaissance de sa défunte fille), la série devient une cellule de crise rurale où le cours de la vie incontrôlé, frise l’excès moral.
Dénué d’artifices tape à l’œil, cadres fixes de longue durée, leitmotive du panoramique horizontal, pas de son extérieur à la narration, la grammaire visuel entend sonder une ville dont les regards perdus et figés de l’homme le plus recherché, Stephen Morton, s’apparentent bien à une situation anxiogène.
Les allers retours dans le temps brossent les perceptions différentes des victimes. Celle de David Whitehead pèse sur l’œuvre. Journaliste blessé par cette ville qui l’a exclu suite à un drame (mort de son père dans une explosion à l’usine à qui lui est imputé la faute), son retour se heurte à une impasse électrique qui lui renvoie le mal du pays doublement renforcé par sa diatribe exaltante diffusée sur le net.
Le parti pris de Southcliffe peut aussi rebuter en nous coupant brutalement de ces vies parties en roue libre dans des actions étranges dénuées d’explication. De la présence soudaine d’un humour british de Paul à un sauvetage désespéré de Claire qui, dans sa position fébrile, veut à tout prix combler l’absence de sa fille par ses dernières volontés qu’elle s’impose, l’émotion acquise aux personnages freine sa lancée par cette déroute, certes justifiée par le drame alourdissant mais opaque.
Southcliffe inscrit ses personnages dans la thématique du mal-être dans sa normalité qui les laisse vivre avec leurs angoisses et leur fragilité à cœur ouvert dans une optique brute et parfois abstraite par un suivi de la caméra qui aime s’attarder sur ce qu’elle voit (le papier peint de la mère de Stephen).