Frères de sang
La dernière création originale de Canal+ est une production franco-britannique plutôt originale avec ses têtes d’affiches, Marc-André Grondin (C.R.A.Z.Y.) et Denis Ménochet en frangins dépareillés...
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le 16 mars 2015
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Dernière née des créations originales de Canal+, Spotless est une série franco-britannique qui réunit deux concepteurs anglophones, soit l’Américaine Corinne Marrinan (Les Experts) et le Britannique Ed McCardie (Shameless), et un metteur en scène français, Pascal Chaumeil (auquel on doit notamment la comédie L’Arnacoeur). Premier constat, si le rythme est plutôt lent, on ne s’ennuie pas devant Spotless puisque, si la série prend le temps de poser ses personnages, l’intrigue avance assez vite, rebondit. A l’image des personnages principaux, la série ne dort jamais.
Le crime est leur affaire
Si Jean, premier personnage qu’on aperçoit à l’écran, est nettoyeur de scènes de crimes, vidées de leurs cadavres, dans sa vie professionnelle, il a lissé sa vie de famille derrière une façade chic et parfaite : un beau pavillon, une belle femme et deux enfants qui intègrent des écoles privées. Pour passer le temps et défaire ses démons, il a une maîtresse. Rien de bien orignal jusque-là, mais c’est comme ça qu’est d’abord présenté Jean Bastière (Marc-André Grondin). On le voit jouer (et jouir par la même occasion) avec sa maîtresse, nettoyer du sang et de la cervelle puis rentrer chez lui où l’attend son frère, l’élément déclencheur. A rebours de la vie toute proprette de Jean, Martin (Denis Ménochet) déménage. Imposant physiquement, sans éducation et un peu paumé, il vient bouleverser la vie de son frère (qui se croyait jusque-là hyper moral) auquel il révèle qu’il a dans sa camionnette un frigo avec un cadavre dedans et de la drogue dans la morte en prime. De quoi plonger les deux frères de sangs (dans tous les sens du terme) dans une macabre association avec un malfrat, poète à ses heures, Nelson Clay et ses acolytes tous plus mafieux et drôles (malgré eux) les uns que les autres. Beaucoup d’influences tournent autour de cette série tragi-comique. On pense alors à Breaking Bad, Dexter ou encore True Dedective (pour le générique). Autant de grands frères, que les frères Bastière frôlent sans les dépasser bien entendu. Ils s’embarquent dans un engrenage déjà-vu, mais on s’attache à leur histoire, à cette inévitable descente aux enfers. Jean, le plus frêle, devient de plus en plus froid et distant (avec sa femme et ses enfants, mais aussi avec sa tâche ingrate et délicate) alors que Martin, au premier abord plus repoussant, devient plus consistant, plus touchant dans sa façon d’être à rebrousse poil, dans le mauvais sens.
Du sang et des bons mots
Côté seconds rôles, on déplore que la famille soit plutôt sous-exploitée, si la rébellion pointe chez la femme de Jean, Julie, elle n’explose jamais et c’est bien dommage. La série repose sur l’association de deux contraires qu’une sombre histoire de cadavre dans l’eau, en France, a séparé tout autant que rapproché (mais cette image mystérieuse revient trop souvent). Portée par une mise en scène intelligente, léchée et imposante, la série se laisse regarder avec plaisir, d’autant qu’on cherche toujours à savoir ce qui va bien pouvoir se passer ensuite. Pourtant, Spotless n’est pas une série si addictive, car elle réutilise des codes usés jusqu’à la corde, mais en se les réappropriant. On devine alors que la force de la série repose toute entière sur son casting, impeccable, et sur ses dialogues, qui font souvent mouches. Parfois très écrites, parfois plus spontanées, les répliques sont un régale. Les situations, un peu moins. Une fois une ou deux scènes de crimes nettoyées, l’idée paraît réchauffée, même si la BO* rend tout ça beaucoup plus accrocheur. Les concepteurs s’accrochent donc à une vision de Londres, souvent filmée en série, plus noire, moins carte postale. Les Anglais rient des Français, les Français des Anglais et ainsi de suite, le cliché se dévisse et s’expatrie. Le jeu des apparences est parfois inattendu, mais parfois seulement. Les auteurs jouent sans arrêt du décalage, musicale (du Trenet dans le premier épisode ou encore Guy Béart dans le troisième), tout autant que fraternel ou visuel. Les foyers deviennent des reflets de leurs occupants, plus que jamais, l’épaisseur psychologique des personnages vient aussi de là. Chacun a la tête de l’emploi et Spotless s’écrit comme une série avec du sang français, mais sans avoir à en rougir, au contraire. La série oscille sans cesse entre notre bonne vieille vulgarité, notre esprit de confrontation et ce petit quelque chose dans l’humour et dans la classe dont seuls les anglais ont le secret. Dans Spotless, tout est sale puis propre l’instant d’après, jusqu’à ce qu’une petite goutte (de sang ou d’eau dans le vase) fasse tout déborder. A suivre donc !
http://www.cineseries-mag.fr/spotless-saison-1-critique-de-la-serie/
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Créée
le 9 avr. 2015
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