Inutile de tourner autour du pot, cette série Star trek qui remet sur le devant de la scène l'amiral Jean-Luc Picard est la meilleure selon moi depuis... pfiou trop longtemps.
Là, j'ai vu les 4 premiers épisodes et je ne vois pas ce qui pourrait mal tourner d'ici la fin de cette première saison. L'image est impeccable, les acteurs sont bons, il y a du beau boulot sur le scenario et Picard est impérial.
Alors souvent on me demande s'il faut avoir vu d'autres Star trek pour regarder cette série ou s'il faut avoir vu 300 épisodes de précédentes séries pour comprendre quelque chose. Et bien franchement je crois qu'on peut regarder Star trek Picard sans avoir vu un seul bout de Star trek auparavant. On est très éloigné de la série "classique" où des ingénieurs discutent dans un jargon imaginaire pseudo scientifique à coups d'incidents sur les bobines de distorsion ou de vitesse distorsion 2. Ici, fi d'une version optimiste et enchantée du futur où la technique et quelques vagues principes néo-colonialistes forment le cadre d'une politique simpliste. Non, dans Star trek Picard on est plutôt dans une ambiance de lendemain de gueule de bois, quand on se rend compte qu'on a laissé la porte du frigo ouvert, que ça sent la mort dans l'appart et qu'il faut tout jeter à la poubelle avant que le syndic entame une procédure d'expulsion.
Oui, Star trek Picard c'est avant tout l'histoire d'un vieil homme qui a vu mourir un monde ancien, qui ressasse ses souvenirs, et boude dans son coin depuis une quinzaine d'année, confis dans un orgueil démesuré. Un élément déclencheur va le convaincre de se remettre en selle et de réparer ses erreurs, ou plutôt de réussir là où il avait échoué dans le passé. Il va se rendre compte qu'il a déçu beaucoup de monde. Ses promesses étaient des prisons et il a à présent de nombreux geôliers.
La filiation est un thème important de cette série, à mon avis en rupture avec les autres versions de Star trek qu'on a pu connaître. Bien sûr, on avait déjà eu droit au passage de relai de capitaines, ou bien plus récemment à la soeur de Spock. Mais dans ce Star trek Picard j'ai l'impression que chaque personnage est à la recherche, qui d'un fils, d'un père, d'une soeur ou parfois de plusieurs à la fois. La filiation, la transmission d'un héritage, d'un patrimoine ou d'un savoir, sont au coeur de cette série et en constituent l'enjeu principal.
Et c'est ici que les spoilers et le theory crafting commencent :
Dans tout bon Star trek, on met dans un shaker La Fédération avec un capitaine de Starfleet, une ou deux espèces exotiques sympas sauf dans les mauvais jours et une autre espèce pas sympa du tout même dans les bons jours. Le capitaine on le connaît, c'est Picard, même s'il a ragequit Starfleet pour cause de désaccord sur le sauvetage des Romuliens. Les Romuliens justement, c'est l'espèce plutôt sympa mais ça dépend des jours. On les connaissait déjà pour être une version elfe noire des Vulcains, fourbes, esclavagistes, avec un culte pour le secret qui confine à l'obsession. Mais bon là ils ont pris cher avec l'explosion d'une nova près de chez eux, alors on compatit. En plus, comme tout n'est pas toujours sombre dans la vie, ils ont parmi eux un ordre de paladins assassins qui défend les causes perdues et ça c'est la classe. L'autre espèce sympathique mais super weirdo quand même ce sont les synthétiques. Des androïdes artificiels, qui se trouvent quelque part vers la version 50 de Siri, Alexa et les robots de Boston Dynamics. Ils sont souriants, forts, rapides, et n'ont pas consciences d'eux mêmes. Sauf qu'un génie (du mal) a un jour fabriqué un super robot, Data, qui est devenu un officier de Starfleet et ami de Picard. On sait donc que c'est possible de refaire le coup et ça tombe bien au début de la série on découvre une paire de jumelles (des filles, pas les trucs qui permettent de voir loin) qui descendrait de Data.
Par contre, les synthétiques ont sévèrement buggué dans le passé et ont détruit mars, dont la surface brûle encore 15 ans après. Ils sont donc interdits un peu partout dans l'univers maintenant et Picard trouve ça très bête. L'espèce pas sympa du tout ce sont les Borgs. Avec eux difficile de discuter, ils ont appris une phrase par coeur : « Nous sommes les Borgs. Abaissez vos boucliers et rendez-vous sans condition. Nous intègrerons vos caractéristiques biologiques et technologiques aux nôtres. Votre culture s’adaptera à nos besoins. Toute résistance serait futile. ». Bref, c'est les méchants. On a eu beaucoup de mal à s'en débarrasser dans le passé et le truc qu'on craint le plus, c'est qu'ils reviennent. Cybernétiques, c'est à dire qu'ils sont en partie mécanique, en partie organique, ils ont la fâcheuse tendance à transformer en Borg tous ceux qu'ils croisent, les intégrant en force à leur collectif dont le nexus central est une reine.
Secouons tout ça vigoureusement dans le shaker, qu'est-ce qui en sort ? Le lien symbolique entre les 3 espèces, c'est Picard. Pote avec les Romuliens (enfin certains), ami des synthétiques, de Data et de sa descendance, et farouche adversaire des Borgs. Il en fut un à une époque, sous le nom de Locutus et il a consacré une bonne partie de sa vie à les vaincre et libérer ceux qui étaient sous le joug du collectif. Le lien narratif est à mon avis le suivant : Les Romuliens détestent les synthétiques car il y a eu un grand problème avec eux dans le passé. Ce problème, c'est que les synthétiques sont à l'origine des Borgs. A un moment dans leur évolution, ils partent en sucette et se mettent à assimiler les autres formes de vie. L'arrivée dans le paysage d'une synthétique parfaite leur rappelle les heures les plus sombres de leur histoire, quand "celle qui détruit", une reine borg, a failli détruire leur civilisation. Le débat moral de Picard va être de choisir entre la protection de celle qui risque de devenir la reine Borg et l'avenir de la galaxie. Bon courage, amiral".
Bref, une super série, qu'attendez vous pour vous y plonger ? En avant toute !