Steins;Gate a ses défauts, peut-être nombreux aux yeux de beaucoup, mais comme je le répète assez souvent, une oeuvre se détache des autres lorsque ses qualités parviennent à éluder une éventuelle focalisation sur ses côtés négatifs. C'est le cas de Steins;Gate.
L'animation, adaptée d'un VN, met en scène Rintaro Okabe et sa persona scientifique, un autoproclamé savant fou boursouflé d'Hubris et répondant au nom de Hououin Kyouma, dans sa quête ultime de développement d'une machine à voyager dans le temps. Le thème du voyage temporel s'avère être un sujet plutôt populaire lors de la décennie passée mais Steins;Gate intrigue par l'originalité d'une donnée peu commune qu'il met en place: le D-mail, un sms temporel, envoyé dans le passé et permettant, s'il est bien formulé, de changer le cours du temps : le D-mail scinde la ligne d'univers, c-à-d la ligne du temps, en deux lignes d'univers distinctes, l'une où l'événement s'est produit et l'une où ce dernier n'a pas eu lieu.
La première partie de l'animé fait évidemment débat, par l'excentricité du personnage principal et sa paranoïa excessive, déblatérant ainsi un flot de paroles sans queue-ni-tête pour le spectateur non averti, par les personnages stéréotypés qui défilent à l'écran et un rythme peu soutenu, irrégulier et décontenançant au premier abord. Cependant, l'atmosphère chaleureuse et conviviale du laboratoire d'Okabe ajoutée à la dédramatisation des événements concrétise majestueusement une volonté d'opposer drastiquement deux parties complètement différenciées tant sur la psychologie des personnages que sur le rythme saccadé des prémices de l'animé qui se muera ensuite en une poursuite effrénée des événements passés.
En effet, les événements se succèdent alors avec une fluidité déconcertante. On assiste avec délectation ou désespoir à la destruction psychologique, à la chute de l'esprit humain, aux explications convaincantes qu'on attendait au tournant et le tout se conclut dans un final logique et parfaitement maîtrisé malgré un léger oubli, sûrement rédhibitoire pour certains, mais d'une gravité bénigne tant les explications manquent sur la toile. La première partie de l'animé s'emboîte magnifiquement bien avec la deuxième, rendant Steins;Gate plus crédible que jamais dans son univers atypique réduit, malgré les quelques occurrences improbables que certains pointent du doigt avec un acharnement excessif.
Énième avertissement des dangers de la science, critique de l'hubris de l'espèce humaine et de sa propension à l'insatiabilité, d'où son incapacité à se contenter du peu et de l'assez, Steins;Gate n'en reste pas moins une aventure humaine, une découverte de soi et une apologie de l'abnégation et de l'amitié.
Steins;Gate m'a bouleversé, renversé,surpris et beaucoup fait rire. Les personnages, les vicissitudes de la vie d'Okabe, l'atmosphère et cet opening, certes long mais tellement parfait... j'en garde un souvenir particulier dont découlent l'affection et l'attachement féroces que j'éprouve à son égard.