MA BIBLE
Mon film préféré. La plus grosse claque artistique de ma vie. Une influence dans ma vie. Un éternel compagnon de route. Le cinéma à l'état pur et au summum. Oui, vraiment ma Bible à moi. Je connais...
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le 21 juin 2016
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Le style David Castello-Lopez se repose sur quoi ?
Déjà, sa capacité incroyable pour surprendre. Comme il utilise un ton constamment journalistique, sauf pour ses chansons, le moindre écart peut susciter le sourire. Mais il ne se contente pas de ça : les écarts de ton portent toujours des phrases réellement enfantines (quand il fait pas le gamin tout court, pour notre plus grand plaisir). Elles surprennent à la fois par leur évidence improbable et cette espèce de candeur digne d'observations de gosse rêveur.
Il y a aussi cette gueule, forcément. Il peut jouer la joie, le beau gosse, le psychopathe, le môme: il aura toujours la tronche d'un homme ne se prenant absolument pas au sérieux. C'est ce qui le différencierait de Franck Dubosc, qui veut user de ses expressions de la même manière. Le visage de Castello-Lopez est à la fois si expressif, et pourtant semblant constamment dans la dérision de tout et surtout de lui-même, qu'il suffit à lui seul pour attirer une immense sympathie.
Mais il y a aussi, comme moteur comique inédit et unique, sa curiosité fantastique. Il est fasciné par l'origine des choses, comme pour surligner l'absurdité qui habille notre avenir. Ces choses sont totalement imprégnées dans notre quotidien, et le fait qu'on les ignore n'attise notre curiosité qu'en étant mis en avant via l'humour. C'était déjà au centre de "Depuis quand ça existe", une série déjà géniale (en un épisode : https://www.youtube.com/watch?v=yDSUnF-4Sco&ab_channel=Lesreportersdudimanche). D'ailleurs, dans l'un des épisodes, pour raconter d'où proviennent les... code-barre, ce mec a réussi à convaincre son équipe de télévision et la production d'aller jusqu'à New York juste pour passer un article dans le tout-premier magasin ayant essayé le code-barre. C'est tellement tarré pour moi que j'étais persuadé que c'était une farce ! Pour "Suisse ?", comme son nom l'indique, c'est centré sur son pays initial, pour parler de Berne, de chocolat, d'emmental, de langue italienne ou, bien évidemment, de montres ultra-chères pour montrer qu'il est à l'aise financièrement, qu'il n'a pas à se plaindre, que les affaires marchent bien en ce moment. Ses gags, jamais démagos, vulgaires ou bien-pensants, servent donc également à apprendre ! Ils surprennent, ils nous font rire, mais vite ils se ravalent pour apprendre sur ce pays si cloisonné dans des clichés alors qu'il a toujours été très ambigu, avec un sourire qui reste tout le long de la vidéo et soulage réellement notre âme. Une prouesse quand même !
Son style rejoint jusqu'au son. Ses chansons sont juste démoniaques ; la fameuse sur la "thune", mais même de courts délires chansonniers sont des régals absurdes de qualité, comme "On se la pète", et surtout "Night Life Berne", qui dure bien 20 secondes (et est presque malsaine à cause de sa lumière en plus !) mais qui a réussi à tourner dans ma tête une journée entière. Parce que la mélodie est irrésistible, parce que ce couillon se dandine irrésistiblement dessus en image, parce que les paroles aiment jouer le contraste du terme abrupt et du vocabulaire châtié ("Ta peau n'est pas bien hydraté... Ton visage est nul). Et, bien évidemment, elles interviennent toujours par surprise, comme des gags dialogués à part entière. Bémol tout de même sur le bruitage grisonnant pour souligner un malaise allié à un zoom (la plupart du temps numérique) ; c'était drôle la première fois, moins la cinquième, et on redoute la saturation à long terme. Mais bon, c'est aussi un élément à part entière de son style.
Et enfin, ce David Castello-Lopez se caractérise à mes yeux d'une précieuse qualité qui se perd : son travail se ressent, se voit, n'a pas besoin d'être dit. Un épisode de "Suisse ?" représente un énorme travail d'écriture, de réalisation, de post-production, de composition musicale (très curieux de voir leur making-off à ceux-là). Mais quand je le regarde, jamais je ne me le dis. J'ai l'impression de voir un gamin s'éclater, et son enthousiasme dans ses enfantillages savants est extrêmement communicatif. Rien n'est là pour souligner un quelconque travail journalistique sérieux, alors que c'est sous-jacent que l'épisode des accents Suisses a représenté de vraies recherches linguistiques. Je suis admiratif de ça, parce que les productions audiovisuelles, surtout sur Internet, cherchent à faire ressentir le temps consacré ou les moyens mis à disposition ; cet homme a réussi, je le répète, à faire payer un voyage à New York uniquement pour acheter une babiole là-bas, mais j'ai la sensation heureuse que c'était un rêve pour lui. Personne ne fait ce genre de rêves. Cet homme est unique. J'ai hâte qu'il revienne, sous la forme de la série qu'il souhaite, laissez-le l'exprimer, en espérant que son style atteindra une plus grande prospérité car il est une leçon d'humour, un anti-dépresseur efficace, et en même temps une discrète incitation à l'émerveillement et à l'évasion. En espérant également qu'il ne s'use pas trop vite, tant il est codifié comme vous avez pu le lire... Merci mon cœur de me l'avoir fait découvrir !
Et que la Suisse se repose sur Darius Rochebin !
Créée
le 7 mars 2022
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