1942-1945 : En 1942, les USA entrent en guerre et Tex Avery chez la MGM : son "Blitz Wolf" n'est pas loin du "Dictateur" de Chaplin, et marque le début d'une décennie de pur génie. Au long de ces 16 cartoons, on voit le style d'Avery se développer, murir, oser chaque fois plus. Plus de folie, plus d'hystérie (le génial Ecureuil Fou, son plus beau personnage), plus de sexe (les tourments du loup affolé par les courbes féminines), plus de délire (les jeux de mots infernaux), plus de second degré (les jeux avec la forme, les matériaux mêmes du film), plus d'agressivité même (les positions anti-Disney ne manquent pas de cruauté).
1946 -1949 : 14 chefs d’œuvre absolus du cartoon, réalisés par un Tex Avery au firmament de sa créativité : 2 heures de délire créatif intense, au delà de toutes les règles en vigueur à l'époque, donc d'un modernisme absolu dans la relation entre fond et forme (les gags qui utilisent la nature même du cinéma). Certains de ces dessins animés ont déjà été vus et revus, mais qu'importe, le confort et la qualité du DVD leur rendent une étincelante virginité, et l'énormité décapante de cet humour secoue toujours autant, vision après vision. Au sommet : la caricature de Sinatra et ses fans énamourées dans "Little Tinker", la cruauté du duel burlesque entre l'écureuil fou et la brute attardée de "Lonesome Lenny", le "My Little Chick Chiken" inoubliable de "The Hick Chick", la première rencontre avec George et Junior dans "Henpecked Hoboes", l'éternelle ubiquité de Droopy dans "Northwest Hounded Police", et surtout la géniale bataille de géants de "King Size Canary", sans doute le sommet de l’œuvre de Tex Avery.
1949-1951 : Le troisième DVD retraçant la période MGM de Tex Avery regroupe 16 cartoons témoignant de la "maturité" acquise au fil des ans par ce véritable génie de l'animation délirante. Si le sommet est sans doute l'incroyable "Symphony in Slang", avec ses jeux de mots à répétition, on se délectera des délires absurdes d'homériques poursuites chat-oiseau ou chien-chat (qui constitueront l'une des mines d'or les plus inépuisables du cartoon US) dans "the Counterfeit Cat", "The Ventriloquist Cat" ou surtout "The Cuckoo Clock" avec son étonnante ouverture "à la manière d'Edgar Poe". Que du bonheur, donc...
1951-1955 : Le quatrième DVD de l'inestimable collection Warner propose donc les 17 derniers dessins animés réalisés par Tex Avery pour la MGM, de 1951 à 1955, et illustre ce qu'il faut bien qualifier de début de la décadence d'un génie : répétition systématique de gags déjà utilisés à l'identique dans de précédents dessins animés, affaiblissement progressif du dessin, qui s'essaye à la stylisation et à une "modernisation" qui dépouillent les personnages de leur grâce et de leur personnalité, concentration sur un Droopy de moins en moins typé, pointes de bons sentiments étonnants chez le maître de l'ironie, bref, la période de pur génie est passée. Reste bien sûr d'uniques moments de bonheur, grâce à des sursauts d'inventivité absurde : l'éblouissant crescendo des métamorphoses de Poochini dans "Magicak Maestro", les moutons dévastateurs de "Drag-a-long Droopy", l'écho bégayant de la voix du fermier de "Billy Boy", le sex appeal "français" de Fifi dans "The Flea Circus",...
[Critiques écrites entre Sept 2005 et Mai 2006]