C'est une petite victoire pour ma compagne, mais non des moindres, que de m'entendre proposer de moi-même le visionnage d'un drama coréen, sans qu'elle ait besoin de me l'imposer ou de m'implorer à genoux pendant des mois (même si son genre, ce serait plutôt de me fracasser la face à coup de poêle à frire jusqu'à ce que je cède, mais chut ! Elle nous lit peut-être...). Sans doute cela signifie-t-il qu'à force de matraquage, je suis passé de l'autre côté de la ligne rouge, mais allez, soyons beau joueur à défaut d'être beau tout court : je ne regrette rien.
On sait les coréens fascinés par la figure du Comte de Monte Cristo, on ne compte plus le nombre de séries qui déclinent ce thème (toujours très efficace, du reste) à toutes les sauces aigres-douces, mais avec the Devil Judge, haaaaa, avec the Devil Judge... on ne joue pas dans la même cour, c'est le cas de le dire.
Non seulement il s'agit d'un excellent Monte Cristo like, mais également (et ça la Corée le réussit toujours très très bien) d'un très beau portrait de personnages amoraux, brisés et borderlines, en bras de fer constant avec leurs névroses.
Au-delà, The Devil Judge met en scène l'affrontement jubilatoire de deux génies psychopathes, avec la loi comme échiquier et le pays entier comme pions à sacrifier - non sans quelques moments d'une intensité rare et d'une amoralité glaçante, le propos ayant le bon goût de n'être jamais manichéen ni d'aucun bord politique particulier. Ouf. Personne n'est diabolisé, personne n'est absout, tout le monde est humain. Les monstres sont partout. Ils ont notre visage.
D'un charisme fou, le protagoniste tient autant d'un Bruce Wayne et d'un John Reese que d'un Harlock/Albator ou d'un Light Yagami (mais en bien écrit). Et même s'ils sont souvent tirés par les cheveux, on se régale de ses moindres coups de bluffs et de leurs réjouissantes conséquences, bien plus crédibles et mieux amenés que ceux du manga en question.
Ceci, jusqu'à la toute dernière seconde.
A cela s'ajoute une très belle réalisation, sophistiquée juste ce qu'il faut, et une bande son prog rock du plus bel effet.
On pourra déplorer quelques deux ex machina un peu faciles, ou une volonté un peu schizophrène de vouloir condenser deux séries antithétiques en une seule, le deuxième pan de celle-ci (façon It's Ok not to be Ok) tendant à invalider certains effets du premier ; mais dans la mesure où les deux sont intéressants et complémentaires, on ne songera pas à s'en plaindre plus que pour le principe.
Sauf que maintenant, la question se pose, alors qu'on ne veut pas dire adieu à ces personnages et qu'on ne rêve que de les retrouver sans plus rien en savoir, comme au premier jour : que regarder ensuite, qui ne paraîtra pas fade et sans supplément d'âme ?
Coeur avec le bandeau sur les yeux et la balance à la main.