L'air désabusé de Kevin Bacon est à propos, bien en place, et son personnage fissuré réussit presque à convaincre.
Malheureusement, on se rend compte que s'il donne cette impression, c'est uniquement par contraste lorsque comparé à tous les autres personnages de la série, à l'exception faite de son jeune acolyte relativement sympathique et crédible, et la meuf du FBI, éventuellement.
Mais le grand méchant cabotineur et son "plan" mis en place pendant 9 ans... Sa façon de surjouer l'autosuffisance et l'indifférence, pour ensuite donner dans l'épisode sept dans le coup de folie nevrotique aussi peu convaincant décrédibilisent en continu ce personnage cousu de fil blanc, personnage au centre du problème, d'ailleurs.
Car on est censé avoir affaire à un plan finement mis en place par un esprit raffiné, une intelligence "supérieure" dépassant de très loin celle des scénaristes qui ont élaboré l'intrigue.
Se réfugiant systématiquement derrière la technique du "ton voisin pourrait faire partie de la conspiration... d'ailleurs c'est le cas, ha ha haaaaaa!", ils empêchent à tout moment l'équipe des "gentils" de ne serait-ce qu'agir logiquement, et font évoluer l'intrigue au fil de l'eau, comme on dit, faisant artificiellement en sorte que Bacon contourne soigneusement l'instrument de Carroll, en soupçonnant dans le laps de temps tous les personnages secondaires, leurs parents, leurs chiens, leurs meubles, leurs sous-vêtements. Mais jamais la bonne personne. Du moins, jamais à temps.
Donc cette petite ruse fonctionne une fois, deux fois, puis on n'y croit plus, on sait aussi sûrement que Starsky et Hutch gagnent toujours à la fin, que Bacon aura un salami de retard, que Carroll aura avancé discrètement dans son plan machiavélique, que bien qu'il enquête sur tout et n'importe quoi, sur les relations entre Carroll et toutes les personnes impliquées, il réussisse à ne pas remarquer qu'il manque des doigts à son avocate, que lorsque cette dernière délivre un poème à la presse, il ne fait strictement rien, mais commence à douter deux épisodes plus tard de son implication dans le Plan Machiavélique.
Oui, je spoile, par lassitude. J'aime Kevin Bacon, et je le trouve très bien dans son rôle, mais la série autour ne suit simplement pas, entre les vrais faux gays, la nounou et ses "on va voir ta maman dans cinq minutes " qui durent (et fonctionnent) depuis plusieurs jours maintenant, l'incapacité à mettre en place quelque chose de solide au niveau FBI, de se douter que si la secte des tueurs infiltre la police ou le SWAT, entre autres, il serait bon de vérifier le passif de tous les gens impliqués...
Bref, la série va où le vent de malveillance et le manque d'inspiration du scénariste la mène, celui ci n'étant animé que par le résultat visé, en dépit du bon sens et en étant incapable de rendre la chose crédible.
Vouloir faire gagner les méchants, c'est cool.
Avoir un méchant mégalo, charismatique (euh, enfin, sur le papier en tout cas), c'est trop trop cool. Si en plus ce méchant est une sorte de génie, c'est encore plus que mégacool, donc übercool. Mais si le scénariste est beaucoup plus stupide que son personnage, ça pose problème dans la mesure où il s'avère incapable de lui donner vie.
C'est comme si l'on faisait un film sur Einstein en le faisant disserter sur des équations à deux inconnus pour arriver à E=MC2.
Lorsqu'on tente de manier des références littéraires et un génie romanesque voire romantique, on s'assure au moins de se renseigner un peu plus loin qu'un reader's digest de Poe et une recherche d'une demi heure sur internet.
Bref, aussi profond que le DaVinci Code, cédant aux même facilités, The Following n'est qu'une idée, une carcasse vide.
Et c'est dommage, parce que Bacon, aurait pu prendre le cochon par les cornes et porter la série sur ses frêles épaules, s'il en avait eu l'opportunité, mais comme on l'empêche de réfléchir pour être sûr que Carroll aura une longueur d'avance sur lui, le résultat est triste, agaçant, et un peu addictif quand même.
Je suivrai la série, mais j'ai le sentiment qu'elle va me faire plus de mal que de bien...
EDIT : ça me chagrine un peu, mais je suis contraint d'augmenter ma note, qui était un 2 tout à fait justifié à la base. La raison est simple, la seconde saison est bien meilleure que la première.
On ne nous présente plus le personnage de Carroll comme un génie, mais bien comme une sorte de loser opportuniste à l'ego boursouflé. Le fait que les scénaristes arrêtent de nous prendre pour des cons et que le personnage assume ce statut lui confère une épaisseur dont il était totalement dénué dans la saison précédente.
Ca ne casse toujours pas des briques, mais une bonne partie des défauts ont été corrigés.
Bref, si toute la série avait été au niveau de cette saison, elle mériterait un 6 indulgent, voire un 7. Mais l'affront de la première saison est tel que j'augmente simplement ma note de 2 points, ce qui est déjà bien généreux.
EDIT 2 : 3eme saison : retour des Deus ex Machina, des méchants qui traversent les murs, des gentils efficaces, sauf quand il faut.
La volonté de punir les gentils, de faire gagner les méchants, c'est rigolo, c'est fun...etc, mais le faire avec autant de ridicule, un tel manque d'intelligence dans la mise en scène, ça frôle le scandale.
La série est portée par des idées qui sont parfois bonnes, mais qui sont mises en place de façon tellement transparente, tellement caricaturale!!
Encore une fois, le travers originel, celui de la première saison, qui consiste à, ironie de la chose, appliquer à la lettre le conseil de Poe sur les nouvelles : "commencer par la fin, puis le twist, puis remonter vers la situation initiale", sans talent ni capacité à créer le suspense. Du coup, retour à 3, un 3 généreux en grande partie dû à des personnages moins creux qui ne compensent pas le caractère grossier et insultant des ficelles utilisées.
Parfois c'est dur d'avoir raison...