The Jinx, c’est avant tout l’histoire de Robert Durst (comme l’indique le sous-titre, The Life and Deaths of Robert Durst), héritier et aîné d’une famille de magnats de l’immobilier à New-York. Accusé par beaucoup de suite à la disparition de sa femme en 1982, directement accusé de meurtre en 2001 quand son voisin est retrouvé démembré dans la baie, le moins qu’on puisse dire est que l’on a affaire à un personnage complexe et torturé. L’originalité de la série est que Robert Durst a lui-même contacté le réalisateur Andrew Jarecki, qui a réalisé une fiction sur lui, pour lui accorder une longue interview. Comme dans son passionnant documentaire Captuting the Friedmans, Jarecki ne se contente pas de rester en surface et de relater l’affaire chronologiquement, il s’intéresse sincèrement à ceux qu’il filme, aussi peu recommandables qu’ils puissent être. Une grande partie de l’intérêt réside dans le fait que le doute est largement permis sur les deux affaires, aucune preuve irréfutable n’étant trouvée pour conclure à un meurtre avec préméditation.
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Le profil du personnage n’aide pas vraiment à le croire innocent, on le sent lunatique, colérique, mal dans sa peau, il a de plus beaucoup de rancœur envers certains membres de sa famille qu’il s’est mis à dos, à commencer par son frère. Ce dernier a fini par prendre la direction de l’entreprise familiale quand Robert a été écarté, et il l’a très mal vécu. On sent l’homme écrasé par le poids de l’héritage, du nom, de responsabilités qu’il ne voulait pas prendre, et je n’ai eu aucun mal à le croire quand il dit que l’argent ne l’a jamais rendu heureux. Qu’il soit innocent ou non, qu’il soit dérangé ou non, on comprend vite qu’il n’a pas eu une vie heureuse ni facile. Difficile de dire ce que nous aurions fait à sa place, et c’est ce que j’aime avec l’approche de ce réalisateur : il évite autant que possible de juger, et nous présente les faits le plus objectivement possible. Dans cette série, il n’hésite d’ailleurs pas à se filmer avec son équipe, en plein questionnements sur les directions à prendre sur la légitimité qu’ils ont à enquêter sur Robert Durst alors qu’ils l’ont pris pour sujet.
La série a certainement moins fait parler en France qu’aux USA, où la presse a assez largement commenté la série, ce qui n’est pas un mal. Si nous n’avez rien lu à son sujet, vous allez être d’autant plus pris par les rebondissements assez incroyable qu’elle présente. Pour ne rien gâcher, le tout est très bien monté, la bande-son est envoûtante et glaçante à souhait, il n’y a vraiment qu’un défaut qui vient un peu ternir le tableau : les reconstitutions. Pourquoi Andrew Jarecki y a eu recours, j’ai beaucoup de mal à me l’expliquer. Elles sont très léchées, mais leur simple présence alourdit parfois la narration. Il aurait semblé plus judicieux d’utiliser ce temps pour approfondir certains points (le rôle de la justice, un peu léger), surtout vu la durée de la série. Dans l’état, on a tout de même une œuvre marquante que je recommande fortement ne serait-ce que pour le personnage de Robert Durst, qui n’a pas d’équivalent dans la fiction.