Alors que la nouvelle trilogie sur grand écran touche à sa fin laborieusement, devenant mal-aimée comme son aînée, la saga Star Wars se décline enfin sur le petit écran en prises de vue réelles après un "Star Wars : Underworld" avorté il y a presque cinq ans. Supervisé par Jon Favreau, "The Mandalorian" se découpe sur huit petits épisodes de 30mn chacun et suit donc les aventures mouvementées d'un Mandalorien, race légendaire de la saga créée dans l'univers étendu avec Boba Fett comme initiateur (chose que Lucas balancera à la poubelle en 2002).
Située entre Le Retour du Jedi et Le Réveil de la Force, la série nous entraine dans un monde cicatrisant encore ses plaies suite à la chute de l'Empire. On parle des Jedi comme des mythes, quelques stormtroopers font toujours régner la terreur et le Premier Ordre commence à balbutier. C'est dans ce contexte sombre que notre héros sans nom va accepter de périlleuses missions. Chasseur de primes de son état, le Mandalorien est un fin tireur, peu causant et déterminé, un aventurier solitaire qui n'a pas l'habitude de faire ami-ami avec ses paires. Mais une banale mission et l'objet de sa quête première, un enfant, vont bouleverser sa vie à jamais. Un pitch classique mais rondement bien mené, qui nous entraîne dans un univers cruel où les traitres sont légion, où la paix ne dure jamais réellement et où l'on raisonne à grands coups de pistolasers.
Visuellement époustouflant (à quelques CGI près), aux scènes d'action d'une efficacité et d'une limpidité rares, accompagné d'une entêtante musique inspirée des meilleurs thèmes de Basil Poledouris et d'une galerie d'acteurs badass (Pedro Pascal, Carl Weathers, Gina Carano, Werner Herzog, Nick Nolte), "The Mandalorian" est une réussite totale, une surprise de taille qui réchauffe le cœur des fans blessés et redonne de l'espoir quant à la direction artistique sur la saga. Sur un schéma classique de mission différente à chaque épisode auquel est agrémenté une fine ligne narrative, cette courte première saison touche dans le mille et, hormis un ou deux épisodes un peu plus faiblard et quelques révélations finales poussives et surtout dispensables, c'est un sans-faute détonant qui fleure bon les années 80.
Notamment réalisés par Dave Filoni (qui avait déjà travaillé sur les séries animées "Clone Wars" et "Rebels"), Bryce Dallas Howard qui passe pour la première fois derrière la caméra après le récent essai raté de son paternel sur la saga mais aussi Taika Waititi pour un épisode gorgé d'humour bienvenu, les épisodes se ressemblent et diffèrent, créant des prémices mémorables aux aventures de ce héros typiquement westernien qui nous fait rapidement oublier les frasques décousues de J.J. Abrams.
Une deuxième saison dans la même veine que la précédente, avec ces missions fortuites, ces imprévus, ces traîtres, ces rebondissements scénaristiques. Léger bémol : le Mandalorien n'est plus du tout ce chasseur de primes sans pitié, il est désormais une espèce de papa poule protecteur (utile à toute l'intrigue de cette saison) mais aussi un peu trop... parlant. Là où sa force résidait dans ses silences pesants, il est aujourd'hui bien plus bavard, s'osant même quelques vannes ici et là. Dommage. Pour le reste, même topo que les huit précédents épisodes, il y a du bon, du moins bon et de l'excellent, en témoignent les ahurissants épisodes 1, 7 et 8, qui, visuellement, enterrent tout ce qui a été jusqu'ici proposé dans l'univers Star Wars.
L'épisode 3, "The Heiress", offre à Bryce Dallas Howard une opportunité de se rattraper derrière la caméra après son pas terrible essai l'an passé tandis que le 7ème, "The Believer", est l'un des plus soignés et des plus palpitants, avec en prime une séquence sous tension fortement inspirée par Tarantino, ici maîtrisée à la perfection. Les nouveaux personnages sont particulièrement bien écrits et apportent une réelle fraicheur à l'univers dépeint, certains étant des têtes connues des aficionados extrêmes comme la Jedi Ahsoka Tano (interprétée par une Rosario Dawson sincèrement stupéfiante) ou encore le premier Mandalorien connu de tous, qui fait un comeback sur écran un peu forcé. Son entrée dans l'épisode mis en scène par Robert Rodriguez souffre d'ailleurs principalement du plus mauvais usage du fan-service, l'épisode en lui-même étant l'un des moins réussis.
Même chose pour le début de saison, un brin fantasque et un peu trop léger, avec cette espèce de batracienne à secourir ou encore les facéties omniprésentes du petit Yoda (qui a un nom) qui amusera au premier abord mais tirera légèrement sur la corde. Reste dans l'ensemble une parfaite continuité de la précédente saison mais également du Retour du Jedi, Jon Favreau et Dave Filoni ayant non seulement capté ce qui faisait la réussite mais aussi le charme de la précédente trilogie, remettant tout simplement au goût du jour ces aventures spatiales westerniennes avec une qualité rare. Ne serait-ce que pour le dernier épisode, aussi forcé et maladroit que touchant, cette deuxième saison vaut le détour, caressant les fans de la première heure dans le sens du poil tout en rassurant les plus réticents. Vite, une saison 3 !