Le cinéma regorge depuis sa création d'antagonistes véritablement détestables et sadiques : les deux voisins dans Funny Games d'Haneke, le tueur en série Lemorne dans L'Homme qui voulait savoir de Sluizer ou encore le nazi Hans Landa dans Inglourious Basterds de Tarantino. Le paradoxe est que ces personnages absolument répugnant finissent par attirer toute la sympathie du spectateur.
La série The Penguin va justement reposer sur cela, en tentant de nous faire oublier que le protagoniste de l'œuvre est une véritable ordure. Car il est bien question de l'histoire de l'ascension d'une ordure, dont l'apparence physique autant cabossée que décrépie vient d'emblée nous renseignait sur la cruauté et la vénalité du personnage.
Je commencerai par dire que formellement, j'ai trouvé la série très moyenne. On reste dans des tons globalement très sombres, avec des plans généralement assez resserrés. Certes, cette esthétique colle bien à l'univers de Batman, mais je dois bien avoué qu'il n'y a aucun plan ou séquence visuellement mémorable. Il en est autant pour les diverses péripéties des personnages. On se retrouve avec d'innombrables scènes de mafias et autres retournements de situations en tout genre, comme on en a vu des dizaines passées à l'écran depuis quelques décennies (Prison Break, Les Sopranos, Breaking Bad, Narcos, Ozark). Rien de véritablement transcendant de ce côté-ci donc. Les Twists quant à eux, sont plutôt décevants, car ils n'arrivent jamais à point nommé, ils ne frappent pas là où ça fait mal.
Ex : Je pense notamment à la mort secrète des frères Cobblepot, passant par un Flashback (non justifié par le scénario d'ailleurs), qui aurait pu être révélée au moment de la confrontation, entre la mère et le fils, pour un meilleur impact dramatique.
Mais alors qu'est-ce qui vaut cette belle note attribuée au Penguin ?
L'atout véritable de la série réside surtout dans ce trio de personnages autour duquel vont orbiter les enjeux du récit : Pingouin, Sofia et Victor. J'ai adoré le développement de ces personnages bien loin de tout binarisme (même si in fine, Pingouin reste une ordure). Il n'y a d'ailleurs pas de réel antagoniste dans ce récit. Le rythme est lent, alors qu'on est dans un univers de super-héros, ce qui laisse beaucoup de temps pour développer la psyché des protagonistes. Ca m'a d'ailleurs beaucoup fait pensé à l'excellente série Daredevil de Marvel, dans les tonalités sombres et l'extrême lenteur du récit. The Penguin, c'est une série qui, comme Shogun (sorti l'an dernier), a bien compris ce qui faisait l'essence d'une série : les personnages. Pas besoin de séquences d'actions époustouflantes ou de combats d'anthologies pour pleinement apprécier le Show (même si il y en a). L'œuvre cherche sans cesse à rentrer dans la folie et la psychologie traumatique de ses protagonistes, torturés par leur passé (l'assassinat des frères pour Pingouin et l'hôpital psychiatrique pour Sofia) ou par des évènements dramatiques subis (la mort de ses parents et la séparation avec sa petite amie pour Vik).
Ainsi la série proposée par Lauren Lefranc est une preuve concrète que l'on peut très largement réalisé une dizaine d'épisodes sur un antagoniste secondaire d'une saga, en prenant son temps, sans que cela soit ennuyant pour autant.