True Detective est une très bonne série. True Detective participe de la révolution télévisuelle débutée il y a quelques années. Mad Men, Breaking Bad, Boardwalk Empire, Game of Thrones ont posé le socle de séries d'une qualité quasi cinématographique dans le soin apporté à la photographie, à la réalisation, à l'écriture, aux décors et aux costumes. Puis débarque Netflix avec House of Cards. En plus de la caution Fincher (qui réaliste le pilot) c'est le casting qui devient Holywoodien : Kevin Spacey, Robin Wright, Kate Mara. True Detective fait un pas de plus en étant la première série ayant un réalisateur unique pour toute la saison afin de garantir au mieux la continuité artistique.
Maintenant qu'on a situé True Detective dans l'Histoire des séries, parlons donc de ce qui fait réellement les qualités et défauts de cette séries.
Dès les premières minutes, et tout le long de la série, Cary Fukunaga, jeune réalisateur talentueux qui a rencontré un certains succès publique et critique pour "Jane Eyre" et surtout "Sin Nombre", créé une atmosphère bien particulière. De ces paysages de Lousianne et de ses Bayous se dégagent une humidité froide et pesante. Un voile de tulle grise et délavée semble filtrer son image et instaure la sensation d'un monde où le mystique se mêle à une réalité plutôt sombre et pessimiste.
Dans ce monde, nous suivons donc l'interrogatoire de 2 anciens flics qui ont enquêté sur un meurtre qui se révèlera l’œuvre d'un tueur en série. Si l'histoire est somme toute très classique (un peu de culture vaudou, un peu de religion, quelques notables impliqués, etc.) et que le principe du récit flash-back est désormais une narration bien connue, c'est dans l'écriture des 2 personnages que se joue tout l'intérêt de cette série. Nick Pizzolato (créateur et scénariste) l'a confessé : les tueurs en série il s'en fiche. Mais peu importe. La série n'est pas tant une enquête policière qu'un portrait de 2 hommes, de ce qui les anime, les construits et les détruits. Pizzolato apporte donc un soin tout particulier à décrire ces 2 hommes. Rust Cohle, brillamment interprété par Matthew MacConaughey, est un homme solitaire, presque asocial, fin psychologue, profondément meurtri par la mort de sa fille et qui en a construit une vision particulièrement cynique et pessimiste du monde et en particulier de l'être humain. En comparaison, Martin Hart, excellent Woody Harrelson, fait figure d'homme affable à la petite vie stable et bien rangée. Presque M. Tout-le-monde. Mais petit à petit on verra qu'il n'en est rien, qu'il a lui aussi ses problèmes (alcool, colère, infidélité) et ses contradictions. Il y a un côté Ellroyesque (Ellroyien ?) dans ces 2 personnages de flics sombres, torturés dont la morale n'obéit pas aux standards.
Avec des dialogues remarquables, on se prend notamment à attendre la prochaine idée philosophico-dépressive de Cohle, des personnages forts et une réalisation maitrisée : ce plan séquence de 6 ou 7 minutes à la fin de l'épisode 4 parcourant plusieurs maisons et traversant plusieurs rues, collant au plus près de Cohle est d'une immersivité dingue et je n'ose même pas imaginer tout le travail de préparation amont, HBO nous offre là une très belle série. On espèrera pour la saison 2 avoir un meilleur équilibre des personnages (le personnage de Cohle est quand même le plus fort de ce binôme) et une enquête qui soit un peu moins classique et dont les tensions dramatiques soient un peu mieux mises en places (les 2-3 premiers épisodes ont un peu de mal à nous impliquer totalement).
Une très bonne série à conseiller à tout ceux qui aiment les séries psychologique (n'y cherchez pas trop d'action, il y en a mais ce n'est pas son point fort) et à tout ceux qui penseraient encore qu'une série c'est du sous-cinéma. A ceux là je leurs dis de s'ouvrir, le monde évolue.
