« True detective » est une série atypique. Sombre, glauque, elle prend son temps pour poser les personnages. Elle n’est d’ailleurs pas sans rappeler « heat » ou « zodiac ». Se déroulant sur plusieurs années, elle développe une intrigue qui aurait difficilement été transposable dans un film, et change des enquêtes policières résolues en un épisode. Mais surtout elle se distingue par le choix de créer une enquête par saison, renouvelant complètement le casting.
Au moment où une affaire de meurtre sordide apparaît, l’inspecteur Marty doit faire équipe avec Cohle, qui s’avère être un détective bien particulier. Cynique et désabusé, il n’a foi ni en l’homme ni en aucune croyance. Rationnel jusqu’au bout, aucun indice lui échappe. Fin profiler, il sait lire dans les gens et parvient toujours à recueillir les confessions des suspects. C’est pour ces qualités que Marty accepte de travailler avec lui sur cette affaire, bien qu’il soit très difficile à supporter. Il ne montre jamais de sympathie, débite des paroles métaphysiques et énonce tout haut ce qu’il pense sans se soucier de vexer son auditoire. Marty lui est l’archétype du flic affecté par son boulot qui lui pèse de plus en plus. Ne pouvant se confier à sa compagne, il cherche le réconfort dans l’alcool et les cuisses de filles plus jeunes. Pour évacuer la pression et préserver son couple, prétexte-t-il rejetant ainsi toute culpabilité. La situation est tendue avec sa femme, qui ne supporte plus ses absences et ses mauvaises humeurs. Un comportement irresponsable que dénonce Cohle, qui s’il est asocial se montre néanmoins intègre. Autant dire que l’association entre les deux est loin d’être facile, et contrairement aux disputes bon enfant entre les deux têtes d’affiche des séries policières classiques, leurs engueulades sont ponctuées de fréquents fuck et shit, allant parfois jusqu’aux mains.
Leur première enquête s’avère des plus épineuses, ils explorent plusieurs pistes sans vraiment trouver d’éléments sérieux. Une enquête qui prend place en plein cœur de la Louisiane, ces vastes territoires déserts, d’industries fumantes et de marécages, remplies de marginaux, de pauvres, d’alcooliques, d’as de la gâchette, de prostitués et de fervents catholiques. Ce qui n’est pas sans rappeler le Miami de « Dexter », propice au crime.
Commencer « True Detective » n’est pas évident. L’ambiance glauque, le rythme lent, les personnages singuliers, les nombreux noms qui s’ajoutent à l’enquête ne rendent pas l’adhésion facile. Il faut quelques épisodes pour avoir vraiment envie de découvrir la suite.
On le comprend dès le premier épisode, l’histoire va se dérouler en plusieurs temps, puisque les deux hommes sont interrogés 17 ans après les événements racontés. 17 ans durant lesquelles leur vie va évoluer, et l’affaire s’avérer très complexe. Il semble que plusieurs tueurs soient en activité, dont les meurtres ne sont pas facilement reliés. Des personnes hauts-placés semblent être impliquées, et tendent à enterrer l’affaire. En raison de son comportement, Cole a bien du mal à convaincre ses collègues de chercher plus loin, tandis que Marty a ses propres problèmes avec sa famille. Finalement, bien qu’elle soit très développée, on s’attache d’avantage aux personnages qu’à l’enquête, à leurs zones d’ombre, leurs failles, qui font d’eux des policiers loin d’être héroïques. Juste des hommes qui font ce qu’ils peuvent pour effectuer un métier pénible et mentalement usant.
En dépit de son adhésion qui peut s’avérer compliquée, la série est très bien maîtrisé et vaut le coup pour le contenu qu’elle offre, même si l’on n’est pas spécialement fan du genre. A voir comment la saison 2 va se débrouiller pour proposer une histoire totalement différente et de qualité semblable.