Dans un presque même genre que Les mystérieuses cités d’or (aventures fictionnelles entremêlées à la mythologie ou à une époque ancienne précise, musiques aux résonances parfois "vangelisiennes" comme, par exemple, les morceaux Chronos et Récits et légendes), Ulysse 31 a, en 26 épisodes, correctement dépoussiéré les vieilles leçons d’histoire en insufflant rythme et modernité à L’Odyssée d’Homère et aux récits de la Grèce antique. Replacée dans un contexte spatial, la série culte créée en 1981 par Jean Chalopin, Bernard Deyriès et Nina Wolmark, mélange les époques, les styles, les influences, et revisite intelligemment les grandes figures de la mythologie grecque (le Minotaure, le Sphinx, Atlas, Sisyphe…) tout en conservant la trame et les événements classiques de L’Odyssée (le Cyclope, la vengeance de Poséidon, Charybde et Scylla, Calypso…).
Quelques épisodes se détourneront des thématiques mythologiques de la série en proposant des intrigues inédites (La planète sauvage, Le marais des doubles…), s’essayant, bien avant Lost, au paradoxe spatio-temporel (Ulysse rencontre Ulysse) ou s’inspirant d’un schéma biblique (La deuxième arche, avec son déluge et ses personnages aux ailes d’ange) et cinématographique (Le magicien noir reprend la trame des célèbres Chasses du Comte Zaroff tandis que Shyrka, l’ordinateur de l’Odysseus, évoque le HAL 9000 de 2001).
Les aventures d’Ulysse, Télémaque, Thémis et Nono (sans oublier Noumaïos et les compagnons), errant dans l’Olympe à la recherche du chemin de la Terre, entraînent le téléspectateur dans un univers foisonnant remplis d’épreuves redoutables et de monstres fabuleux. La beauté, la grandeur, l’inventivité des décors et des créatures (le Cyclope, le royaume d’Hadès, la tour de Circé qui rappelle les gravures d'Escher...) contrebalancent une animation et des dessins pas toujours aboutis, manquant parfois de précision, de fluidité, mais qui ont assez bien vieilli dans l’ensemble pour une série de plus de 20 ans.
Ce défaut (superflu) ne peut empêcher complètement le plaisir de s’émerveiller devant ce dessin animé enchanteur (pour les plus jeunes) ou de le redécouvrir avec nostalgie (pour les thirty something). Car pour ceux-là, quelle joie de se remémorer ces instants magiques où, à 19h55 jadis sur FR3, l’enfant d’alors s’impressionnait de ces aventures extraordinaires, s’imaginait en héros intrépide bravant les pièges d’Éole ou combattant une hydre gigantesque, et tremblait en entendant la voix inquiétante de Zeus (celle, envoûtante, de Jean Topart). Et, gamin toujours, qui n’a pas versé une larme devant le sacrifice de Nanette (dans l’épisode La cité de Cortex) et le chagrin de Nono face à la perte tragique de sa bien-aimée, à jamais oubliée parmi les étoiles… C’est encore plus bouleversant que l’infâme trépas de la mère de Bambi.