Je cite en titre une phrase que dit Albert de Saxe Cobourg à Victoria dans l'épisode quatre de la première saison en guise d'introduction, car elle résume mon point de vue sur cette série. Une phrase qu'il n'a d'ailleurs surement jamais dite puisqu'elle est sortie d'un contexte inexistant, mais je vais y revenir.
Ayant adoré du début à la fin Downton Abbey, produit lui aussi par la chaine ITV, j'ai été assez heureuse de voir une série basée sur la plus jeune et importante reine de l'Histoire de Grande-Bretagne et d'Irlande.
J'avouerai tout de suite que j'ai tardé à regarder cette série car je n'aime pas particulièrement la manière de jouer de Jenna Coleman, dont le départ de Doctor Who fut pour moi un immense soulagement. Aussi c'est avec un peu de scepticisme que j'ai débuté, me demandant comment une actrice que j'estime si peu puisse sublimer une si magnifique reine. Je suis férue de séries historiques, et la plus récente a été The Crown, produite par Netflix. Autant dire qu'il y avait du niveau à relever, car outre les moyens engagés beaucoup plus importants, la véracité des faits était juste, un peu romancé certes pour les parties obscures que seul le cercle familial peut connaitre, mais pas pour les faits historiques ou avérés par des témoins de toute sorte.
Dans Victoria, c'est tout l'inverse. Je peux compter sur les doigts d'une main la véracité des faits énoncés dans les trois premiers épisodes, mais il me faudrait aussi mes doigts de pieds pour énumérer les erreurs et autres mensonges qui s'y sont glissés.
Premièrement, Victoria n'a jamais, au grand jamais, été amoureuse de son premier ministre. Aussi agréable à regarder est-il dans la série, la quarantaine sexy, la voix suave (VO) et les yeux pétillants, en vrai c'était un homme de plus que 50 ans, bedonnant, qui a certes servi de mentor à la jeune reine mais qui a plus fourni une figure paternelle dont elle manquait qu'autre chose.
Autant dire qu'à partir de là, tout le synopsis de la saison un tombe à l'eau. Mais poursuivons.
Sa mère et son conseiller Conroy ont en effet été mauvais, la gardant enfermée à Kensington Palace où elle a eu une enfance plutôt morose, à dormir dans la même chambre que sa mère, et ayant pour seuls amis son petit cavalier king charles et ses poupées.
Mais de là à conspirer dans son dos avec son oncle pour lui coller une Régence et essayer de la désigner comme folle, ce sont des inepties. Ce même oncle a toujours eu le désir d'aider sa nièce.
Victoria n'a ensuite jamais agi pour ou contre les Chartists. Elle n'était pas vraiment l’héroïne de roman qu'on essaye de nous vendre dans cette série, féministe avertie défendant la veuve et l'orphelin, elle a eu une vie de monarque qu'il ne faut pas oublier.
Viennent ensuite les faits non historiques mais tout aussi aberrants. les rats qui grimpent le long du gâteau d'anniversaire de la reine. Albert qui déchire sa chemise en plein bal pour y glisser une fleur. Le même Albert qui va déchirer sa chemise une nouvelle fois pour faire un garrot au petit chien blessé de la reine. La reine qui emprunte les carrosses de ses dames de compagnies pour aller déclarer son amour à son premier ministre à la barbe de tout le monde au beau milieu d'un parc. Victoria et Albert qui ne peuvent pas se supporter avant de tomber dans les bras l'un de l'autre (parce que hey, en vrais ils se marient!), alors que c'est un fait avéré qu'ils se sont plu dès leur première rencontre. De fait, il n'a jamais été jaloux de Melbourne.
Oh, et un ajout, assez inutile mais pure remarque: la cuisine de Buckingham Palace est moins remplie d'employés que celle de Downton Abbey. Si c'est pas un comble et une grossière erreur ça... Un cuisinier, deux serviteurs, une intendante et une coiffeuse. Parfois un ou deux valets de pieds qui passent. Voilà à quoi est réduit le personnel.
Je n'entrerais pas non plus dans le détails plus que nécessaire sur le fait que Jenna est certes petite mais trop grande par rapport à Victoria, mais que surtout elle est une fois encore, trop maigre. Dans sa jeunesse, comme toutes les jeunes femmes de hauts rangs ne vivant pas dans la rue à crever de faim, Victoria était relativement dodue, ou plus gentiment, bien en chair. Ici j'ai vaguement l'impression de voir un ersatz de Kate Middleton, un aspect que j'avais déjà remarqué quand elle incarnait Clara Oswald...
Quand on aime l'Histoire comme moi et en particulier celle du Royaume-Uni, cette série fait grincer des dents. Les costumes sont beaux, les scènes d'extérieur sont très jolies, mais quand on s'inspire d'une figure historique pour en faire un vulgaire soap, transformer l'une des reines les plus importantes de l'Histoire en une amoureuse transie qui papillonne, ne sait pas quoi décider sans l'avis de son premier ministre, c'est réellement très agaçant. Je ne sais pas si j'aurais la force de regarder cette série comme si elle racontait la vie d'autres gens que ceux dont elle est sensée retranscrire les faits.