Après l'adaptation cinématographique ultra-fidèle de Zack Snyder en 2009 et le prequel dessiné en 2012, c'est au tour de la suite du chef-d’œuvre d'Alan Moore d'apparaître sur le petit écran. Toujours renié par ce dernier, c'est l'alambiqué Damon Lindelof ("Lost", "The Leftovers") qui se charge d'adapter cette séquelle située 34 ans après le comics original, dans la petite ville de Tulsa, en Oklahoma, où les conséquences du plan parfait imaginé par Adrian Veidt prennent tout leur sens...
Il est avant tout indispensable d'avoir lu le comics pour comprendre toute la teneur de ce nouveau scénario tout aussi pensé et machiavélique que son aîné et en cela, il faut admettre que Lindelof et sa team s'avèrent être de fiers successeurs tant cette nouvelle histoire est un creuse-tête réfléchi, complexe et intéressant. D'abord difficile à suivre, débordant de mystères à n'en plus finir, de personnages anciens se mêlant aux nouveaux, de références succinctes à des indices cachés, la série prend peu à peu son envol avec une maîtrise de tous les diables, se construisant pour cela à travers de nombreux flashbacks, certains étant même des épisodes entiers.
On pourra certes grincer des dents devant la prise de risque de certaines révélations, du traitement de certains personnages, mais force est d'admettre que tout se met en place avec une logique déconcertante et un sens aigu de l'écriture. Handicapée par un budget parfois plus restreint (notamment au niveau des maquillages), la série demeure néanmoins visuellement travaillée et plaisante, grandement aidée par une mise en scène dynamique, des acteurs choisis sur le volet (Regina King, Yahya Abdul-Mateen II,Tim Blake Nelson, Jeremy Irons et Jean Smart en tête) ainsi qu'une entêtante et glaçante musique signée Trent Reznor et Atticus Ross.
À travers neuf épisodes, Lindelof nous garantit un scénario complexe, fidèle aux idées originales du premier comics, dévoilant quelques prises de risque inattendues mais restant dans l'ensemble puissant et construit, fantasque mais cohérent. Le sacrilège de proposer une suite digéré, on ne peut qu'admirer le travail d'écriture et le traitement sérieux accordé à une intrigue insoupçonnée qui fera ravaler la salive à pas mal de détracteurs (votre rédacteur le premier). Comme le souligne la fin du récit, on ne fait pas d'omelettes sans casser des œufs.