Le Grand Bluff
Un œil distrait aurait tort de prendre la dernière oeuvre de SBC pour une bouffonnerie à la Patrick Sébastien version politico-trash. Certes le créateur de Borat et de Bruno ne renie pas son goût...
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le 16 sept. 2019
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Par métastase contaminé, j'ai cédé. Mais bon, l'à la mode "méta" colle comme une capote poisseuse au travail du sapeur transgressif qu'est Sacha BC.
Ce mec est un surréaliste. Comme ce mouvement incarné par habitude en la personne de Dalí (mais auquel on rattache aussi Jodorowski... ) "Metabaron" Sacha fait de la provocation un modus operandi sinon un modus vivendi. A la différence notable qu'il ne livre pas seulement une oeuvre provocatrice à ses contemporains, il les confronte au plus près, provoque et piège sur pellicule.
Sacha BC me bouscule là ou Dalí me laisse froid -je ne suis pas du tout sensible à son imagerie. Presqu'à l'inverse, si Sacha BC est sympathique en interview ( https://m.youtube.com/watch?v=9_cZB-k058o ) il n'est pas aussi fantasque et truculent que Dalí : bref, la plus belle oeuvre de Dalí, c'est Dalí, la plus belle oeuvre de Sacha BC c'est son oeuvre.
Après une assertion aussi péremptoire que tautologique, me v'la bien.
Je ne listerai pas mes interviews favorites, mais j'en citerai quand même quelques unes, en premier lieu celle de Dick Cheney le bien nommé. Dans son costume de facho israélien, Sacha BC lui fait signer son "water tank" fétiche, celui des "cures par l'eau". Ne serait-ce qu'incarner un facho israélien, "du Mossad, non pas du Mossad" est un acte franchement courageux pour un juif pratiquant comme l'est SBC. Mais alors qu'il prétende que son "water tank" est signé par Ariel Sharon et Netanyahu, c'est brandir une réelle liberté de pensée et ses couilles titanesques. Aux nez des orthodoxes d'Israël comme à celui de leur inconditionnel protecteur que sont les USA.
On reproche souvent à Sacha BC ses méthodes. Elles sont à mon sens aussi magistrales qu'indispensables. Comment faire avouer à un Dick Cheney les pratiques de "l'interrogatoire poussé" dans ses détails, le faire signer son symbole, lui dire en face qu'il faut vraiment être crétin pour tirer sur son compagnon de chasse, si ce n'est en le caressant dans le sens du poil ? On voit bien que Cheney est géné aux entournures, qu'il se demande d'où sort cet olibrius. Il cautionne pourtant en signant, sans hésitations, par peur de n'avoir pas l'air de soutenir les politiques les plus douteuses du grand allié du moyen orient, politiques dont les condamnations par l'ONU n'aboutissent régulièrement pas en raison du veto americain.
Par manque de caractère aussi sûrement, si ce n'est par pure bêtise, comme ce fut le cas pour Jason, représentant au parlement de Géorgie.
Même si Sacha BC semble tirer tous azimuts, je trouve les démocrates franchement épargnés. Presque à chaque fois, c'est Billy Wayne Ruddick Jr., PhD, le complotiste Trumpetiste qui en sort ridicule et perdant. Sanders et quelques autres n'ont pas su comment réagir ni déceler l'imposture, mais au final ils ne sont pas accusés de grand chose si ce n'est de manquer de clairvoyance et de combativité. Du pipi de chat comparé aux forfaitures républicaines. Je n'en suis pas franchement surpris, Sacha BC est un libéral, au sens anglo-saxon du terme et ça se voit. Il lui fallait une caution pour ne pas être accusé d'oeuvrer à charge, s'acquitter d'une convention sociale hypocrite et nécessaire, sous peine de voir l'ensemble qualifié de brûlot partisan, ou de tract bas du bulbe.
Je pense de toutes façons le débat stérile. Sacha BC n'est ni journaliste ni juge arbitre d'un duel télévisé. Sa subjectivité est évidente, et il fait évidemment partie d'une des deux équipes.
Si le but principal est de faire marrer, il est atteint, mes cuisses en témoignent. Certains américains avaient peut-être besoin du recul d'un regard extérieur, britannique, pour voir la poutre dans leur oeil droit. Par contre, si chaque intrusion dans le débat est fracassante et qu'elle fait mouche, je ne pense pas que l'influence de son travail puisse dépasser de beaucoup les limites de son cercle de sympathisants, qu'elle puisse faire bouger les lignes. C'est à mon sens la limite de l'outil "provocation", comme du surréalisme.
Une tendre pensée pour Sarah Palin, créditée au générique comme consultante en publicité. La voici à l'œuvre, aux prises avec une journaliste au moins aussi objective que Sacha BC :
https://m.youtube.com/watch?v=1VNEJrsaOJk
Pour commenter cet ultime exemple, qui n'a pas été inclus aux épisodes diffusés, je reprendrai l'argumentaire de SBC tel qu'il l'exprime dans son interview en lien plus haut : tant que vous ne dites pas "non", vous êtes complice. Il l'adressait autant à lui même et à ses sympathisants qu'au citoyen lambda de tout bord comme de toute nation. Il semblerait que Palin ait dit "non", qu'elle ait quitté l'interview. J'espère qu'on aura compris que je ne porte pas Palin dans mon coeur, et si cela s'est vraiment passé comme elle le prétend, on peut lui reconnaître d'avoir tenu le metabaron en échec. Bon, il se trouve que sa stratégie par la suite ne fut pas des plus avisées... Un peu trop pitbull peut-être...
Créée
le 5 août 2021
Critique lue 52 fois
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