Le Loup et le Chien

Le chien a une vie simple et heureuse. En échange de nourriture, d'affection et de sécurité, il doit obéir à son maître et le protéger. Le loup n'a pas cette chance. Il doit chasser pour survivre, transmettre ses gènes, et faire face aux dangers de la nature. Cependant, en sacrifice de sa sécurité, le loup est libre. Il ne reçoit d'ordres d'aucun maître si ce n'est ses besoins naturels, et n'est pas attaché à une laisse. Sa maigreur fait peine à voir, mais aucune marque de collier l'étouffant n'est visible autour de son cou. Le chien est bien portant, tant qu'il se limite à l'espace défini par la longueur de la laisse.

Ces deux visions du monde sont le propos de Wolf's Rain. Dans un futur incertain, le monde est dans le chaos absolu. Les civilisations ont disparues, la nature est morte, seules quelques cités subsistent tant bien que mal sur les décombres des temps que l'on suppose anciens. Il n'y a pas d'histoire, si ce n'est des légendes auxquelles on ne croit plus. Les Nobles, gouvernants des cités et rares persistances du passé, sont presque invisibles et se querellent pour des raisons que l'on ignore.
Mais les légendes refont surface. La prophétie du Livre de la Lune, évoquant le retour des loups et la destruction du monde, est sur le point de se réaliser. Un loup blanc, Kiba, surgit en ville, et petit à petit forme une meute avec les autres loups de la cité à l'apparence humaine, un chef de gang, un voleur et un séparé de son maître. La raison de leur alliance approximative ? Leur nature de loup, et la quête du Rakuen, paradis dont personne ne sait rien, mais auquel Kiba semble étrangement lié.
Chaque membre de la meute, malgré leurs motivations singulières, sont instinctivement rattachés à elle, le destin veut que les grands hommes (ou les grands loups) se regroupent pour changer le monde. Leur voyage les amènent à réveiller les vestiges du passé. Un robot cabotant et comme animé par un désir de destruction harcèle Tsume et Toboe avant d'être mis péniblement en pièce par Kiba, un vieux morse dernier représentant de sa race, une vieille meute de loups survivant en se soumettant aux humains, un couple de vieillards en camping car, chaque étape de leur voyage témoigne à la fois de l'agonie du monde et de la nécessité d'y échapper en rejoignant le Rakuen, à supposer qu'il existe.

A la manière de Cowboy Bebop, en plus de la place du hasard dans le récit qui s'apparente quelquefois plus à de la paresse d'écriture qu'à un réel propos, les personnages sont toujours rattachés à leur nature, pour les loups, qui doivent choisir entre une vie sans histoire auprès des humains (ou, pour Kiba, dans une rêverie meurtrière) et une vie en liberté mais dangereuse, et à leur passé. Le policier Hubb Lebowski et la chercheuse Cher Degré ont beaux être divorcés, ils chercheront tout au long de la série à se réunir. Le shérif Quent (repose en paix, Unsho Ishizuka) traque désespérément les loups encore vivants, qu'il tient responsable du meurtre de sa famille, aidé par... une louve, Blue, qui révélera plus sa véritable nature et se séparera difficilement de son ancien maître. Le noble Darcia veut soigner sa femme, et Jaguara, soeur de cette dernière et antagoniste tardive, veut conquérir le coeur de Darcia. La nature et le passé définit la vie des individus, et les plus forts seront ceux qui vivront non pas indépendamment, mais sans être systématiquement entravés par ces deux critères. Le Rakuen symbolise l'objectif ultime de vie de chacun, et quelques-uns sont près à donner leur vie pour réaliser ce rêve (donner sa vie pour Cheza, celle qui permettra la réalisation de la prophétie).

Visant en priorité les jeunes adultes, Wolf's Rain invite à devenir un homme libre, en se camouflant parmi la foule et empruntant les inventions des grands hommes du passé, pour ainsi échapper à la tristesse du monde et le changer par ses actions, ou inspirer les futures générations à poursuivre cette voie. Tout à l'image de l'excellent opening, très simple et très fort à la fois.