Contrairement à la crêpe au chouchen, à l'En Avant Guingamp, à Matmatah, à la ville de Vannes ou à Tessa Martin (liste non exhaustive), Miossec est une de ces exportations dont la Bretagne n'a pas lieu de rougir. Alors que la Corse n'a jamais rien produit de bon dans le domaine musical (Alizée, I Muvrini…), la Bretagne peut s'enorgueillir de posséder un des plus talentueux song writers français actuels. Inutile de dire que son cinquième album éveille la curiosité. Plus que le pénultième opus obispien ou toute production pagniesque.
Depuis l'excellent Brûle en 2001, Miossec a écrit pour d'autres (Juliette Gréco, Johnny Hallumay le feu…), donné des concerts enivrés – pour ne pas dire bourrés – et composé un peu pour lui. Le résultat est là, 1964 . Année de naissance du bon Christophe – pas votre humble serviteur – cet album sonne comme un bilan… à jeun. Tout est calme, tout est tranquille dans cet album, aucune chanson plus haute que l'autre. Inquiétante à la première écoute, cette impression se confirme : nous avons droit à un Miossec apaisé. Cela fait peur à entendre, un Breton qui n'est pas saoul.
Et puis, on réécoute, on s'interroge. Tant de sobriété doit cacher quelque chose. Les textes parlent toujours d'amour, d'amour, encore d'amour. Même si dans Brûle il confessait "Pourquoi les chansons parlent-elles toujours d'amour, c'est un sujet inabordable", le constat est là : Miossec plus qu'un autre sait trouver les mots justes pour ne pas en parler.
Il a arrêté la bière pas chère pour le bon vin millésimé. Le privilège de l'âge. Et cela s'entend. Il a enfin compris que 1664 et bon Bordeaux ne pouvaient se comparer.
Depuis cinq albums, Miossec décline toujours la même ritournelle mais parvient à ne pas lasser. Pour cette album, il a fait appel à l'arrangeur de Bashung et à un orchestre de cordes. Le résultat, sur "Ta chair ma chère" ou "Dégueulasse", est tout simplement splendide.
Mélange de cordes, cuivres, percussions et guitares électriques vaporeuses, chacun de ces morceaux est l'illustration d'un nouveau Miossec. Brûle était un tournant, 1964 la confirmation.
Souhaitons maintenant à Christophe de rester en vie, comme il le dit lui-même : "Rester en vie, ce n'est que du music hall, un spectacle hors de prix, une grande foire agricole".