On parle souvent de la fuite des cerveaux, moins de l’arrivée des talents. The Artificial sea est un duo américain qui vit toujours à New York mais il est signé sur la structure toulousaine Travelling. Ce City island apparaîtra comme un effet positif de la mondialisation tant ce disque va vite devenir essentiel pour tous les amoureux de voix féminines aussi personnelles que bouleversantes. Alina Simone devient sous nos oreilles envoutées le chaînon manquant entre Cat Power, de Beth Gibbons et et Bjork (plus proche de l’Américaine sur le plus rock Gloryhole ; de l’Anglaise sur Happy ending, de l’Islandaise sur Tunnel vision), trois références qui économisent tout un tas de verbiage rendu inutile, sur une personnalité à fleur de peau, des intonations fiévreuses et autres images d’excellence. C’est vrai que la voix d’Alina marque l’épiderme de n’importe quel auditeur normalement constitué (c’est-à-dire avec des oreilles). Mais celle-ci n’occulte pas le reste, l’apport de Kevin C.Smith, l’autre partie du duo, qui dessine les paysages parfaits pour la voix de sa compagne.
The Artificial sea a dépassé le trip hop, l’a débarrassé de son emphase sombre, de son académisme bien comme il faut ; tout ça dans le but de lui faire retrouver sa chair originelle. Ainsi dégraissée, utilisant des boucles à bon escient (Vor et son petit côté brésilien à la Smoke city), ne plombant pas tout sous un jazz de bon ton, la musique de the Artificial sea délaisse les bars lounge bien comme il faut où la musique est utilisée à usage décoratif pour réinvestir la vraie vie, avec ses émotions crues et brutes. Même si le duo utilise beaucoup de machines et aime l'electronica, il émane de leur musique un parfum d’acoustique rehaussé de violoncelle et même de saxophone (outpost et sa guitare électrique en forme de toile d’araignée). Bref en dépit de son The Artificial sea distille de l’authenticité par tous les pores de sa musique.