Avec Christina Rosenvinge, tout est question de distance. De loin, l’Espagnole de naissance, Danoise d’origine, avec son physique d’hôtesse de l’air, propose une musique bien sous tout rapport, parfois un peu jazzy, parfois un peu folk, parfois un peu bossa (Quien me perra ? qui évoquera les regrettés Le Mans). Bref, le genre de chanteuse qui verra le quadragénaire employer l’expression toute faîte « de bon goût ». Rosenvinge sera hâtivement rangé entre Lisa Ekdhal, Charlotte Gainsbourg et Claudine Longet ou tout autre icône pop des années 60 (A liar to love). Toute est question de distance et la jolie blonde, à y regarder, de plus n’est pas si consensuelle que ça, si douce et si figée dans une posture impeccable que l’on pourrait imaginer. Les choses sont indicielles, subtiles et une simple dissonance vient noircir fort à propos la douce quiétude de Continental 62.
Un certain malaise Lynchien transparaît derrière l’élégance. Comme un Blue Velvet musical. Emporté dans le tourbillon de Tok, tok (un titre que n’aurait pas renié jack the Ripper), l’angélique Christina, cousine de Stina Nordenstam devient subitement étrangement perturbée. Pour une fois, le cabaret révèle le vrai visage de ses personnages. White hole installe même la chanteuse dans la tradition un peu pouilleuse des chanteuses country-folk. Le titre plus rugueux mais tout aussi classe (même dans la « ferme Célébrité », Christina aurait gardé son aura de princesse) rappelle plus que les autres que Continental 62 bénéficie de la présence de Steve Shelley (la chanteuse est carrément signée sur son label), Lee Ranaldo et Tim Foljahn (bassiste sur les premiers Catpower). On doit sans doute à ceux-là et à d’autres d’avoir tiré un peu plus Christina Rosenvinge du côté des ténèbres.