Banale pour banale, on préférera toujours la pop putassière d’un Mylo Xyloto (Coldplay) à celle, maigrelette, de Days, deuxième album des curieusement adoubés Real Estate. Pourquoi ? Parce que les premiers savent habiller leurs chansons pour les rendre attractives quand les seconds jouent la seule carte du vintage, de la nostalgie : le résultat est certes typé, mais il s’avère en fait désuet.
Coldplay a ce savoir-faire suffisant pour donner naissance, album après album, à des singles capables de remplir les stades. Leur force, ce sont les arrangements, cette faculté qu’ils ont de nous faire croire que leurs mélodies un peu patatouf, aux gros sabots, fonctionnent comme au premier jour alors qu’on les a déjà maintes fois entendues. C’est cela l’habillage : de grands orchestres criards qui aguichent, séduisent (guitares, claviers, chœurs, cordes, section rythmique écrasante). Tout ce qui peut grossir le son, le gonfler à bloc semble bon à prendre. Leur nouveau titre avec la reine du R’n B Rihanna en est la meilleure preuve, et cette propension à utiliser des sons synthétiques, jusque dans la rythmique, rappelle évidemment l’orientation prise ces dernières années par d’autres mastodontes de la pop tels que Muse ou Placebo : ça ratisse large, c’est pompiériste. Mais tout de même, quand c’est bien fait, ça fonctionne.
A l’inverse, les indie-guys de Real Estate, avec leurs effets de guitare super rétros et une production volontairement cheap, peinent à mettre en valeur des mélodies elles aussi prévisibles. Real Estate n’a pas le songwriting pour se permettre de maquiller ses chansons de bric et de broc. Une, deux, trois écoutes et autant de rendez-vous où tout ce que l’on entend, ce sont de gentils arpèges avec une gentille voix, point. Rien ne dépasse, rien n’est faux, mais rien ne séduit réellement l’oreille. Il y a une forme de timidité uniforme dans l’enrobage des compositions qui n’appelle absolument pas à approfondir leur connaissance. C’est pourtant ce que beaucoup aiment chez eux, cette simplicité désarmante, cette réaction épidermique au phénomène de foire qu’est devenue la pop d’aujourd’hui, faste et tape-à-l’œil. Mais le problème c’est que dépouillée de ses oripeaux, une mélodie n’est qu’une mélodie, et alors il mieux vaut qu’elle soit superbe. Real Estate n’a pas ce talent. Leur musique aux accents eighties a plus un goût de poussière que de madeleine de Proust.
Eh oui, c’est peut-être un triste constat mais Mylo Xyloto, qui tombe dans les travers d’un certain jeunisme, vaut bien mieux que la tentative arty mais ennuyeuse de Real Estate. « C’est pas parce qu’on est dans l’underground qu’on fait des trucs mieux » disent les français de Sexy Sushi. Ils ont raison !