Et après, on verra par denizor

Lou n’est pas le genre de chanteuse à se faire facilement aimer. Pas le genre à emprunter un chemin clair et simple et à offrir des titres facilement chatoyants aux oreilles. La dame n’est pas antipathique mais sa musique ne caresse pas vraiment dans le sens du poil : une voix en apesanteur avec des intonations un peu rauques, une arythmie changeant chaque titre en mélopée, une prise de son d’où ressortent des brumes une batterie intimiste, des guitares dépressives et des percussions évoquant des bruits de musique concrète.

L’orgue est ici de circonstance et l’ensemble est profondément triste. Le monde de Lou n’est pas folichon et se rapproche de l’écriture de Dominique A. ou de Mendelson. Finalement, petit à petit, on fait sien cet univers gris et on en apprécie d’autant plus les contours imprécis. On a parfois l’impression que, comme sur une photo floue, le point n’est pas toujours fait. Ou que derrière la présence de Lou, les formes ont tendance à se fondre et disparaître.

On a parfois le même genre de sentiment avec Holden mais qui est exacerbé ici avec quelques sons francs émergeant d’une abstraction musicale. La voix de Lou ressort d’autant mieux et on apprécie d’autant plus les mots de la jeune femme, son écriture personnelle et ses textes sur la difficulté d’aimer. Il se dégage de là une vraie poésie où mots et musiques semblent en parfaite adéquation pour traduire des états âmes.

A La prunelle de mes yeux (morceau 1), on est pris à froid par Lou voire même un peu agacé ; à je n’ai rien fait (morceau 4), on relève franchement la tête et à D’avril à juillet (morceau 6), titre le plus poignant de l’album, on est carrément conquis. L’univers est à apprivoiser, l’entrée un peu rude comme un premier bain de mer par temps gris mais cette ultra-sensibilité finit par séduire durablement.