Après une année de voyage, Orouni revient aux joies de la musique. Mélodies sophistiquées et fraicheur préservée, pop is beautiful.
Le Parisien Orouni n’en est pas à un paradoxe près : songwriter à l’ancienne, solitaire et méticuleux dans l’écriture, mais la jouant collectif dès qu’il s’agit d’enregistrer son album et, invitant à tour de bras des copains pour jouer sur son disque. L’homme est amateur d’arrangement chiadé et de belles orchestrations mais il donne à sa musique un sentiment de, proximité lié à un esprit home studio. C’est bel et bien cette fraicheur qui émanait de Jump Out the Window, excellent disque d’une power pop qui semblaient être jouée par Charlie Brown et tous ses amis. Orouni, un Mc Cartney ou un Adam Green que l’on peut avoir comme ami, la tentation est grande et le charme aussi. Mais ça, c’était il y a 5 ans, une éternité quand on a l’effervescence créatrice d’Orouni et ce besoin viscéral de rencontres musicales. Il faut dire qu’entre temps, il s’en est passé des choses…
« Les voyages forment la jeunesse » dit-on. De ce côté-là , Orouni a été servi : le jeune homme a passé plus d’une année à sillonner la planète (Corse, Berlin, Mali, Thaïlande, Afrique du Sud, Sénégal, Australie, Japon, Brésil, Finlande, New York, Chine, Chili et Liban…excusez du peu). Ce n’est pas rien et il en reste forcément quelque chose une fois rentré à Paris. Grand Tour peut être perçu comme un journal de bord que l’on enregistre a posteriori. Il ne faudra pas chercher de trop de trace ethnique dans le disque. Sur quelques morceaux néanmoins, le Français utilise avec gourmandise des instruments à cordes venus d’ailleurs, (charango ou cavaquinho brille par leur légèreté de sonorités). Il a aussi recours à des percussions, balafon ou Kalimba, avec tout un morceau construit autour de l’instrument (Kalimbalism avec une mélodie flottante à la Paul Simon). De quoi remplir encore un peu plus la ménagerie instrumentale déjà largement présente sur Jump Out The Window.
Après un an d’abstinence musicale, la passion d’Orouni pour la musique semble avoir redoublé de vigueur – l’influence de cette année de voyages est peut-être à chercher là : dans ce plaisir décuplé et palpable. A ce titre, Grand Tour est bien un Jump out the window version 2.0. Plus d’invités (Jean Thevenin, batteur de Frànçois and the Atlas Mountains ; Toy Fight ; The Rodeo ; Mina Tindle ; Angil and the Hiddentracks ; Syd Matters ; Thousand ; les Colettes), plus d’arrangements de tout poil (des cuivres, des cordes, des choeurs), plus de genres musicaux visités., Un peu Phil Spector, un peu Neil Hannon, un peu Neil Young (Firearms a un petit côté Like a Hurricane version acoustique), un peu Jeremy Jay quand des claviers viennent prendre la place de la kalimba. Orouni est un peu tout ça à la fois…
Une personnalité à la fois intimiste et débridée (fan qu’il est de The New Pornographers et Of Montreal), Orouni est du genre bon élève, un peu propret en apparence, quand il s’agit de composer une mélodie sophistiquée mais laissant un vent de folie soufflé dessus. Avec lui,, la musique n’est pas à sacraliser mais reste au contraire une matière vivante qu’il est bon de partager et d’un peu secouer. Talentueux et modeste, Orouni est capable de faire une oeuvre aussi ample qu’un thème de Morricone mais choisit de confiner cette majesté dans l’exigüité de sa chambre (The Sea castle ; Dear Volcano). Et miracle, on ne perd pas change : les harmonies restent, mais, délestées de tout sentiment d’écrasement et de toute prétention, elles apparaissent encore plus touchantes. La vision musicale d’Orouni reste toujours à hauteur d’homme et de cette dualité naissent des moments aussi beaux que Wild Geese and Cigars. Le titre sonnait bien comme une évidence, Grand Tour, grand disque.