Angèle David-Guillou prend son monde à contre-pied par un album classique et délicat influencé par la musique de la fin du XIXe. Un beau disque.

On connaît bien la jeune femme pour l’avoir apprécié dans Ginger Ale, comme membre honoraire de Piano Magic et sous le nom de Klima, son propre projet musical. Angèle David-Guillou revient cette fois-ci sous son propre nom et ce n’est sans doute pas un hasard. La musicienne/ chanteuse se met à nu et commence son album sur une simple pièce pour piano instrumentale (Anti-Atlas). Un vrai travail d’épure, qui dans sa forme la plus minimaliste, trouve néanmoins la voie de la sensibilité. Ce thème un brin mélancolique rappellera fortement les thèmes des BO de Yann Tiersen, lui-même influencé par Erik Satie ou Maurice Ravel. Cette filiation restera effective même quand des violons rentreront dans le spleen musical de Angèle David-Guillou pour lui donner un peu plus de vigueur mais tout autant de délicatesse (Hesperides). Sur Kuril, la musicienne y rajoute des percussions donnant dès lors un petite touche ethnique à son thème musical. Mais – et cela tient du miracle, même dans un dépouillement extrême, la musique semble touchée par la grâce (Accalmie).

L’acoustique a toujours fait partie de la musique de Klima mais celui-ci était couplé avec de l’électronique, qui plus est dans des compositions pop. Oserons-nous dire que le jeune femme change de climat. Pour Kourouma, la Française abandonne tout aspect de modernité pour regarder en arrière, dans une visite nocturne des boudoirs et des salons du XIXe siècle. L’ensemble paraît éclairer à la bougie et la Française ne réintroduira que parcimonieusement, et par touches, un semblant d’électricité : cela se fera par un piano électrique dont la vibration sonore, couplée à une scie musicale, remplace certains éléments de composition qui donnaient chez Satie ou Ravel une touche orientaliste (Dream of Leonor Fini, sa gnossienne à elle).

L’auditeur aurait été quelque peu frustré s’il n’avait pas entendu le joli timbre d’Angèle David-Guillou dans cet album signé de son nom. C’est chose faîte et c’est tant mieux : un ange alors semble se poser sur le joli fil musical (But Now i’m a joyful). Sur Kourouma, la jeune femme donne une voix à ce spleen Satien, là où Gonzales avait choisi, pour Solo Piano, de rester muet. Sur And the Grass was singing, des choeurs légers suffisent pour donner une dimension céleste à cette sérénade. Dire que l’on est sous le charme est un doux euphémisme.
denizor
9
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Les meilleurs albums des années 2010 et Les meilleurs albums de 2013

Créée

le 18 nov. 2013

Critique lue 67 fois

1 j'aime

denizor

Écrit par

Critique lue 67 fois

1

D'autres avis sur Kourouma

Kourouma
BenoitRichard
9

Critique de Kourouma par Ben Ric

[...] Album épuré, sobrement arrangé avec la présence discrète de cordes, "Kourouma" est une petite merveille de musique mélancolique, avec des chansons aussi intimistes que bouleversantes qui...

le 24 nov. 2013

Du même critique

Oiseaux-Tempête
denizor
8

Critique de Oiseaux-Tempête par denizor

Le monde appartient aux ambitieux et Oiseaux-Tempête ne nous propose pas un simple voyage post-rock mais une véritable Odyssée dans une musique qui n’a pas encore livré tous ses secrets. Album après...

le 10 janv. 2014

13 j'aime

Pain Is Beauty
denizor
8

Critique de Pain Is Beauty par denizor

Il est amusant de voir la promo de Chelsea Wolfe ramer pour définir la musique de la demoiselle : « drone-metal-art-folk » tel est le genre-valise utilisé pour catégoriser la musique de l’Américaine...

le 28 oct. 2013

12 j'aime

After My Death
denizor
7

Psyché adolescente et autopsie d'une société

Samaria ou Poetry, le cinéma sud-coréen est hanté par les suicidées adolescentes. Nouvelle pierre à cet édifice mortifère, voici After my death, premier film de Kim Ui-Seok. Glaçant. Kyung-min, une...

le 19 nov. 2018

11 j'aime