Au départ le projet du seul Mark Van Hoen, Locust, qui n’existe plus aujourd’hui, était de l’électronique/ambiant sombre. Mais peu à peu la musique de l’anglais a mué en un trip hop élégant aux multiples contributions vocales. Dont celle de Neil Hastead, fondateur de Slowdive, le meilleur groupe de dream-pop au monde ! La précision est importante, car Morning Light, en plus d’être le meilleur album deMark Van Hoen, peut se percevoir comme un hommage à ce courant musical peu représenté et souvent associé, à tort, au mouvement shoegaze, beaucoup plus bruyant.
Morning Light offre une nouvelle lecture du trip-hop, plus psychédélique, tant il laisse une place importante aux manipulations sonores, aux associations a priori contre-natures d’instruments naturels et électroniques : mais tout est éthéré, tout respire, comme si le groupe évoluait sur un tapis de nuages. Vraiment, par moments, on a l’impression d’être transporté, de voler au-dessus d’un royaume perché dans les cieux. C’est en cela qu’on ressent l’influence forte de Slowdive, qui, avec ses délicates réverbérations, ses delays appuyés, laissait entrevoir une nouvelle perception du son, comme si leur musique était jouée en apesanteur, dans l’espace. Pour ainsi dire on est finalement loin de la poisse urbaine qui colle aux basques des deux ténors du trip-hop, Portishead ou Massive Attack…
Chez Locust, ce sont les instruments acoustiques qui endossent le rôle des sons cosmonautes : une guitare acoustique, un mellotron, des flûtes et cuivres élégiaques, et puis ces voix pures, haut perchées, dans lesquelles se lovent les chansons de Morning Light. Bien sûr les synthétiseurs et autres boîtes à rythme sont présents, sinon on ne parlerait plus de trip-hop. Mais tout semble joué avec retenue, délicatesse, dans le respect d’une sorte d’idéal de la douceur, voire de la contemplation.
Les nombreuses interludes de Morning Light, discrètes, bucoliques, où l’on entend des chants d’oiseaux, un ruisseau qui coule, un orage qui gronde, renforcent ce sentiment de rêve éveillé, fil rouge de l’album. Morning Light est définitivement un album estival, frais, propre sur lui, qui distille une nostalgie et une bienfaisance singulières.