Fermez les yeux, vous êtes déjà morts :

Si l'idée d'éternité peut paraître à la plupart d'entre nous, un concept incroyablement pénible comme elle serait purement atemporelle et infinie, rien que dans le titre de l'album, Betwixt and Between [que j'abrégerai B&B dans cette critique] replace le concept d'éternité dans la temporalité. Elle ne durerait qu'une nanoseconde.


Une nanoseconde étant ce qui précède la seconde, quelque chose qui se déroule sous nos yeux, mais que nous ne voyons même pas tellement elle est fugace. L'éternité serait donc quelque chose de fugace, mais pourtant au fondement de la façon (contemporaine ?) de comment nous mesurons le temps, ou devrions-nous plutôt dire la durée des choses.


Chaque chose est programmée pour mourir, vous, moi, votre banquière, votre télé, les touches des ordinateurs...
Le philosophe allemand, Martin Heidegger, appelait ce concept Sein zum Tode, couramment traduit par "Être-vers-la-mort".


Cet album, Nanosecond Eternity a été publié par le label/collectif d'artistes doujin [musique japonaise autoproduite, autogérée et autocréé entre autre] HARDCORE TANO*C, collectif réputé pour sa série HARDCORE SYNDROME.


Dans le 5ème opus de cette série, B&B a composé une musique au nom de tout est bien (Sein Zum Tode).
6 moins après cet album, il sortira un ultime morceau dans l'album, toujours du même collectif, Bright Colors, au nom de So Sweet Bitter Days.


Il mettra fin à ses jours le 17 septembre 2012.


B&B est de ce que nous pourrions appeler un de ces artistes maudits, producteur de musique intéressante, méconnue et toujours en marge de la norme de canons esthétiques musicaux. Mais malgré cela, il a su rester fidèle à un univers et bien qu'angoissé et angoissant, il n'a jamais été suffoquant pour autant.


J'ai toujours trouvé que ses musiques relevaient d'un véritable coup de force, et qui fricotaientt très souvent avec le génie. Cet album ne fait pas exception à la règle.


Tourmenté, incroyablement noir, extrêmement varié en terme de sonorités, parfois tellement lourdes que j'avais du mal à aller jusqu'au bout de certains morceaux , et de genres musicaux tels que la Psytrance, le Freeform, l'IDM, le Gabba... [et j'en passe], dont il faut être déjà un peu familier pour y vraiment voir le génie dedans.


Des cris de rages, des explosions de colère, énormément de désespoir et de fatalisme, et surtout un homme seul face à ses démons que sont la spoliation de son temps, confisqué, réduit jusqu'à destruction et le fait d'avoir été mis au ban de la société, d'avoir été considéré comme un rebut comme il a très probablement toujours refusé de s'y pilier à ces normes rances qui dit aux individus comment ils doivent, de la façon la plus violente qu'il soit, et non devraient éventuellement se comporter.


Sa musique m'a toujours beaucoup inspiré et l'annonce de son suicide en 2012 m'a profondément affecté.


L'éternité c'est long. Surtout quand nous ne la voyons pas passer.


Repose en paix Kaowru Kimura, j'espère que là où tu es maintenant tu as pu réouvrir tes yeux.

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le 30 sept. 2018

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