On reconnaît souvent un grand album dans sa faculté à se réinventer en permanence, à nous faire croire que l’on a compris d’emblée l’esprit du groupe pour mieux nous surprendre ensuite. Red thread complexifie sans cesse la vision, première que l’on avait de lui. Avec Keith, tout semblait jeter dès la bio qui nous précisait l’origine géographique du groupe (Manchester) et dès le premier titre, le Smiths-ien back There, brillant morceau au demeurant, mais qui devait doublement sceller le groupe dans le case post-bande-à- morrissey-et-marr. Car si Keith reste toujours pop, ils accolent sans cesse un nouvel adjectif à la définition que l’on pourrait donner à leur musique. Sexy et dansant sur Mona lisa’s child, obsédant à la manière des Stone Roses (Faces), plus direct et abrasif (leave it now), psyché version madchester (You), mutin et enlevé à la manière des Shins (Hold that gun), en nuances clair-obscur sur Unsold thoughts. Avec eux, le piano peut avoir des accents affectés, la voix une certaine morve toute britannique, le reste de l’instrumentation se charge de remettre dans le droit chemin les écarts éventuels. La rythmique mène un jeu brillant fait de carré, de syncopes jazz, de volte-face et d’inventivités permanentes. De même, l’instrumentation se montre sans cesse riche et imaginative et sort définitivement le groupe du schéma « ligne claire » des Smiths et consorts (The Isles cette année). Ajoutez à cela des mélodies et vous tenez là un des incontournables groupes pop de 2006.