Lorsque paraît le premier album éponyme de Rock Goddess, le groupe a déjà cinq ans d’existence, alors que les sœurs Turner, Jody (chant et guitare) et Julie (batterie), et la bassiste Tracey Lamb n’ont pas vingt ans. Produit par Vic Maile, ce disque frappe par la puissance de ce power trio féminin, chose plutôt rare à l’époque.
En 35 minutes d’un heavy metal direct au son distordu, Rock Goddess entraîne l’auditeur dans un univers évoquant des relations sentimentales comme sur « Heartache » qui ouvre le bal avec efficacité, « The Love Lingers Still » ou le provocateur « Make My Night » sur lequel Jody chante «I want your body, is that obscene? I need your body, dirty or clean Well I ain't fussy baby, with you it's o.k. I'll give you all you want, if only you'd stay ». Ces filles n’ont peur de rien et le prouvent en livrant une belle prestation aux croisées du metal et du rock, avec des incursions presque pop sur « Take Your Love Away ».
Dès les premières notes de « Heartache », la voix de Jody frappe par sa gouaille, tandis que la section rythmique, carrée et efficace, soutient des riffs plaqués qui claquent. Cette marque de fabrique se retrouve sur plusieurs des onze titres composant cet album. Le rythme médium qui s’accélère au moment du refrain donne envie de secouer la tête en cadence. S’ensuit « Back To You », un speed-punk direct de moins de 2 minutes assassin comme un uppercut et dont le refrain est soutenu par des chœurs hurlés. Une fois le déluge passé, « The Love Lingers Still » paraît presque calme alors que son rythme enlevé s’installe de manière sournoise et vous donne envie de taper du pied en cadence jusqu’à la dernière note.
On s’aperçoit que Rock Goddess est capable d’écrire de vrais morceaux, tous différents les uns des autres. « To Be Betrayed » en apporte une preuve flagrante avec sa mélodie insidieuse qui perce le cerveau, avant de laisser la place à « Take Your Love Away » au chant plus posé et à la construction nuancée. Ce couple de chansons marque une pause avant le déferlement qui suit.
En effet, « My Angel », un des hymnes du groupe, déboule à cent à l’heure et semble s’adresser à tous les fans mâles du groupe. En inversant les codes du metal, Rock Goddess ose montrer que les filles aussi peuvent exprimer leurs sentiments sur une musique brûlante. Pourtant, le trio peut encore frapper plus fort avec « Satisfied Then Crucified » au riff énorme qui s’inscrit quelque part entre Motörhead et Girlschool. Vient ensuite « Start Running », à la basse omniprésente qui marque une réelle originalité dans sa construction soignée, à la fois nuancée et insidieuse.
L’album se termine par trois morceaux puissants : le heavy « One Way Love », assez basique, mais au groove étonnant proche de ce que peut sortir Girlschool, le speed « Make My Night » que tous les fans reprennent en chœur lors des concerts et l’hymne « Heavy Metal Rock 'N' Roll » qui achève de convertir les indécis : « It’s better than love it’s better than sex » lance Jody dès le premier couplet. La messe est dite.
L’album rencontre un succès relatif en se classant dans les charts anglais.