Ce disque là, on devrait le détester. Il faut dire que Grovesnor a tout pour agacer : une voix de crooner soul lâchant dans l’atmosphère plus de phéromones que le bellâtre Usher ou le colosse Barry White. Des mélodies « attrapes-filles » qui ne rechignent pas à jouer de la dent qui brille et du clin d’œil du séducteur ; à se demander si cette musique ne pourrait pas se retrouver sur les BO des films érotiques de M6. Et surtout, il y a les arrangements électro-pop aux relents 80’s cheap and chic... de pacotille. On croirait à un pastiche ou à une expérience plus ultime que chez Daft Punk, Sébastien Tellier ou Zoot Woman. Grovesnor et sa Lamborghini blanche roule à sens inverse, plus à une vitesse de dragueurs que de pilote de course. Le volant est tenu par Rob Smoughton, par ailleurs batteur d’Hot Cheap, ce qui est en soi rassurant pour la qualité du projet.
On devrait détester et finalement, non…on s’attache. Peut-être sommes-nous un peu nostalgiques de « Deux Flics à Miami » (ce qui est déjà un coming out). Mais surtout, quoi qu’on en dise, il y a les mélodies, qui non content d’être efficaces voire racoleuses ou d’un goût douteux, sont carrément bonnes. Indéniablement. Il y a du Billy Joel ou du Joe Jackson dans cette écriture, sauf que le piano a été troqué pour des claviers. Pour la peine, dans ce domaine, au final l’essentiel, Smoughton ne badine pas et chiade son travail à l’extrême, autant que peut le faire Phoenix par exemple. Radical, Grovesnor ? En quelque sorte, oui ! Décalé et ironique ? Sans doute. Moderne ? Parfois aussi, quand des programmations électronica viennent filer un peu d’Acid à cet univers de costard blanc sur tee-shirt pastel. Bref, on aiguise d’abord les griffes et puis, on se radoucit un peu au contact de ce soft return.