Tout au long d'une carrière hors des sentiers battus, Hector Zazou sera parvenu à faire le lien entre des artistes aussi différents que Philip Glass, Suzanne Vega, Riuschi Sakamoto, Harold Budd, David Sylvian, John Cale ou Bjork. Zazou aime collaborer avec des personnalités fortes et ce fait acquis ne changera pas avec "Strong currents". Ici, les intervenants sont représentés par une galerie de voix féminines et se nomment Laurie Anderson, Lisa Germano, Lori Carson et même notre Jane Birkin nationale qui retrouve ici la langue de Shakespeare. La musique de Zazou sera difficilement classable. On pourra néanmoins en dégager quelques tendances. On retrouve les émotions procurées par le Trip Hop : un spleen insondable délayé par des arrangements délicats et magnifié par une voix féminine à fleur de peau (Mmmm chanté par Mélanie Gabriel, la fille de qui vous imaginez, réussit le tour de force d'évoquer Portishead. Anja Garbarek à l'époque de son "Smiling and Waving" expliquait que sa musique était faite pour accompagner une visite d'expo contemporaine. La musique de Zazou peut aussi parfaitement remplir ce même but. On se laissera donc conduire au son d'Under my Wing sur lequel plane l'ombre de Bjork . S'affirme aussi ici un goût affirmé pour la musique classique qui rapproche Zazou de Zend Avesta. Moins fan de Shostakovitch que ce dernier, Zazou témoigne d'un attachement pour la musique française, qui, de Fauré à Ravel, a toujours misé sur une sensibilité dépouillée. Faite de teintes pastels, dans une tonalité froide, la musique de Zazou avance tout en douceur, sans tapage aucun. Ce que l'on appellera par défaut "Trip Hop" peut faire l'économie de l'électronique. Il n'en est pas moins magique, arrivant même à émouvoir sur Beauty chanté par Jane Birkin. Ce qui est pour un réfractaire à l'anglaise (que je suis, je dois bien l'avouer)la preuve que "Strong currents" peut être porteur de miracles.