Prog Pink Floydien
Kadavar fait partie des groupes qui savent le plus utiliser leur culture musicale pour en faire des albums toujours originaux tout en conservant leur influences apparentes. Tantôt Led Zeppelien,...
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le 17 déc. 2020
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Durant les années 2010, le monde de la musique à vu naître de nouveaux groupes apportant de nouvelles sonoritées au paysage musicale. S'il me fallait en citer que quelque uns, je serai tenté de citer King Gizzard and the Lizard Wizard, Hällas, Idles, All Them Witches et bien d'autres. Il en est un groupe que je n'aurais jamais pensé pouvoir catégoriser dans cette mouvance de groupe que je qualifierai de novateur.
Découvert en médiathèque avec leur album Abra Kadavar, le groupe Berlinois n'est autre, comme le dirai ce chère Max Yme, un réchauffé de Black Sabbath et Led Zeppelin, avec une touche de Stoner. Poursuivant ma découverte, j'écoutais ainsi les très bon Berlin et Rough Times, y décelant au fil du temps des petites pépites musicales, tels que À l'ombre du temps ou Into the Night, sans jamais réellement m'attaché à un album en entier, certains titres me laissant de marbre. J'apprenais bien évidemment avec le temps à apprécier un peu plus certains titres comme ceux du première album (au line-up d'ailleurs assez différent), mais rien de bien surprenant.
Arrive l'an 2019, dernière année de liberté et d'insouciance, durant lequel j'étudiais sur Lyon, logé cette fois-ci dans une chambre étudiante. A moi donc la liberté d'aller voir des concerts le soir. Le premier fût évidemment celui de Kadavar, le 12 Novembre au CCO. Ma liberté d'étudiante fût ma première raison pour aller voir ce groupe qui ne m'importait que très peu à l'époque. La seconde fût l'annonce en première partie de Mars Red Sky, mes chouchou français avec leur incroyable The Light Beyond, ainsi que Hällas, groupe suédois dont on entendra encore beaucoup parlé dans le futur. La dernière raison qui m'amena à prendre mon billet fût l'écoute de leur dernière album en date, For the Dead Travel Fast. Un mois avant leur tourné, Kadavar nous sortait ici leur chef d'œuvre incontesté. Rien qu'avec les trois singles, le groupe venait de se prouver à mes oreilles comme étant bien plus qu'une pâle copie de Black Sabbath. Le titre The Devil's Master en est pour moi la preuve irréfutable, subtile mélange entre Ennio Moricone (R.I.P.) et les Beatles, le groupe dépeignait une sublime fresque épique, agrémenter d'un superbe clip. Une fois l'album sortie, le titre final Long Forgotten Song ne venait que confirmer le fait que le groupe venait enfin de sortir un grand album.
Avant le concert, Christoph « Lupus » Lindemann (guitariste et chanteur), Simon « Dragon » Bouteloup (bassiste et français de surcroit) et Christoph « Tiger » Bartelt (batteur) se proposait une petite venue au Tiki Vinyl Store de Lyon en dédicace. Une petite rencontre dont j'en garde quelques souvenirs. Puis le concert. Une fois sortie de cette folie, comme à mon habitude, je me créé une playlist sur mon portable comprenant l'ensemble de la setlist du concert, redécouvrant ainsi les titres passé du groupe, apprenant à les apprécier à leur juste valeur.
Arrive ensuite l'an 2020, celui dont nous nous rappellerons de ses catastrophes naturelles, ses problèmes politiques ainsi que sa crise du Covid. En Mars 2020, c'est le début du premier confinement. La France, l'Allemagne ainsi que de nombreux pays demande à tout le monde de rester chez sois. Alors en pleine deuxième partie de tournée, les membres de Kadavar rentre chez eux, retrouvant famille et chômage. Ni une, ni deux, les artistes poste le 25 Mars leur Studio Live Session Vol. I, reprenant l'intégralité de la setlist auxquels j'avais eu droit quelques mois plus tôt. Puis silence total. Seul une sonorité étrange restera gravé par ce live, le retour de l'étrange introduction du titre Children of the Night, non disponible dans la version studio, avec ses touches de piano, son ambiance planante et terrifiante. Tout cela ne faisait qu'annoncer ce qui nous intéresse aujourd'hui.
Le 6 Août, alors que je sort enfin de chez moi après un confinement prolongé, le groupe sort un nouveau single et annonce un nouvelle album moins d'un an après le dernier. Le titre s'appelle Everything Is Changing et clôture à merveille cette période de ma vie, que le groupe Muzz avait ouvert pour moi avec leur titre annonciateur Bad Feeling. Dès le début du clip, les berlinois annonce un changement, un renouveau orchestré par cette période. Un piano, très peu de guitare, un ton plus Beatles qu' à l'habitude, moins violent, plus posé. Dans la description du titre, le chanteur explique sa volonté d'écrire un renouveau du groupe, plus atmosphérique, plus silencieux.
"So we started recording out of this new mental state, we would use loops for the very first time or play around with sounds we have never used before, resulting in a trip through our minds that captured these special times where everything was changing." Lupus
C'est bon, The Isolation Tapes s'annonce une relecture des plus passionnante de nos vies changé par le confinement général, dont l'histoire s'écrit déjà à travers le premier single. Le second, Eternal Light, conte une nouvelle histoire. Le son est alors encore plus neuf, avec une ambiance de rêve, appuyé par son clip sublime. Le titre part dans des envolés de guitare qui resteront gravé dans ma mémoire comme l'un des plus beau titre du groupe. Le morceau parle cette fois ci du plaisir de se retrouver chez soi, de retrouver sa famille, et de profiter de ce temps nouveau que le confinement n'a eu de cesse de nous offrir, un malheur pour certains, un bonheur pour d'autres.
"I guess that’s what the song is about - take a good memory and let it lighten you up." Tiger
L'attente était à son comble. L'album s'annoncé comme un incontournable, un renouveau dans la discographie du groupe, mais surtout, comme une pièce maîtresse de cette période, une trace de l'histoire pour mieux définir cette crise sans précédent.
Aujourd'hui encore, je l'écoute. Je le réécoute sans arrêt, hypnotisé par son ambiance.
L'album début par 5 morceau raccordé par le chiffre romain précédent chacun d'entre eux. Et c'est dès le début que l'on retrouve les prémices de ce qui avait été entamé lors de la tournée, cet intro mystique que le groupe avait utilisé pour ouvrir le "Encore" du concert, sert aujourd'hui d'ouverture à l'album. The Lonely Child est un morceau instrumentale qui monte en puissance, créant un atmosphère nouveau pour le groupe, qui ne saurait rappelé Pink Floyd par instant, l'un des groupes majeurs, semblerait-il, pour la création de The Isolation Tapes. I Fly Among the Stars ne fait que confirmer cette idée, plus planant que jamais, où la voix de Lupus fait enfin son entrée. La batterie y est toujours puissante, mais les guitares bien moins virulente. Les solos font écho à ceux de Gilmour, mais l'album reste bien ancré dans cette volonté de citation qui à fait la renommé du groupe. Ici seulement, Kadavar réitère sa palette d'artiste des années 60/70 pour y composer sa vision du confinement.
L'album enchaîne avec Unnaturally Strange (?), le morceau au ton bien différent, plus dans la veine western spaghetti du précédent opus. Et arrive alors la pièce maîtresse de l'album, en dehors de ses singles, la surprise de cette palette d'expérimentation. (I Won't Leave You) Rosi, un titre très prog dans l'idée, amenant après sa partie planante, un rock plus entraînant, plus propre au groupe, finissant sur un solo des plus puissant. The World Is Standing Still replace un contexte plus planant, rappelant même Shine on you Crazy Diamond, afin de clôturer cette petite saga en 5 partie, bien qu'assez étrangement raccordé. Bien que je n'ai pas encore étudié la question de l'histoire de chacun de ces titres, le groupe n'ayant pour l'instant ajouté aucune anecdote concernant leur création, j'entend ici la paix qu'à recherché le groupe lors de la conception improvisé de ce nouvelle opus pourtant déterminant, j'en suis sûr, dans leur carrière. Leur rapprochement avec Pink Floyd ne me réjouis que d'autant plus.
La deuxième partie de l'album consiste en grande partie à placer les deux singles que j'ai déjà détaillé plus tôt. Ils sont raccordé par un son plus proche des Beatles, avec un titre rappelant définitivement Strawberry Fields Forever par ses notes de synthé. Un titre plus triste, dont les paroles semble décrire l'ennui et l'étirement de cette période désormais bien longue, comme emprisonné à l'intérieur de soi-même. Concernant la fin, bien moins marquante pour ma part, elle en reste tout à fait intéressante. The Flat Earth Theory est une interlude bien étrange, rappelant certains vieux films de SF avec ses notes très spatiale, ouvrant un univers de possibilité des plus larges pour le groupe. Et la fin s'offre à moi avec tristesse, ayant toujours regretté que les albums de Kadavar n'eussent durée plus de 45 minutes. Le dernier titre, Black Spring Rising, fût travaillé en collaboration avec une autre artiste, Ilgen‐Nur, qui ne tardera pas à être ma prochaine grande découverte musicale, j'en suis sûr. Un titre dans la lignée des morceaux planant et floydien de l'album, mais qui reste assez anecdotique par rapport aux autres. Il s'agit surtout de la voix de Lupus qui prend ici une importance bien plus grande et très agréable, accompagné vers la fin par la jeune chanteuse, formant un duo assez sublime.
Aujourd'hui, en plein second confinement, j'écoute cet album en boucle comme une thérapie face à mon désarrois grandissant. J'écris ici mon amour pour cet album qui, malgré un recul encore impossible de nos jours, à su capter une certaine essence de ce que fût le confinement pour nos générations, ce que nous avons pu vivre, ressentir et éprouvé, ce que nous vivrons surement encore quelques temps. Heureusement, il nous reste un album pour patienter. Et peut-être l'espoir d'une suite à The Isolation Tapes. En tout cas, une chose est sûr, Kadavar est devenu pour moi un groupe incontournable de l'an 2020.
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le 1 nov. 2020
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