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Un monde pour soi
7.2
Un monde pour soi

Album de Prohom (2013)

Jugé comme un franc-tireur il y a 10 ans, Prohom apparaît désormais comme une figure centrale de la pop made in France, aux côtés de Dominique A., Murat, Benjamin Biolay. Tout en ayant su garder sa patte.


Le Lyonnais a sorti son premier disque en 2002. La carrière s'annonçait alors belle, signé qu'il était chez Polydor. La major avait su déceler chez l'homme un style et une force allant au-delà des mots. Le mélange électro-rock/chant en français n'était alors pas si légion. Plus de dix ans après et seulement trois albums plus tard, on retrouve Prohom sur un petit label, n'étant pas connu du grand public comme on aurait pu l'espérer. On aurait tort de ne voir dans cela qu'un échec. Et si celui-ci est quantitatif, il n'en est rien au niveau de la qualité. A la fois plus assagi et plus sûr de lui, l'homme a gagné en stature.


Un Monde Pour Soi est son album le moins rock et comme un vase communicant, il est aussi le plus électronique. Les textes sont moins durs et violents. Pourtant, on aurait tort de croire que, dans l'un et l'autre de ces domaines, Prohom soit devenu un chanteur français lambda, un homme rangé des voitures. Le Lyonnais a le pessimisme sec et définitif. Je voudrais que tu sois morte clame-t-il sur cette déclaration nihiliste aux accents Biolay-ien. Comment lutter ? demande-t-il résigné ailleurs en écho à son Peu Importe de l'album précédent. La cause semble, pour lui, aujourd'hui perdue et la musique sonne comme une nouvelle parenthèse créative et introspective (comme si dehors n'existait pas dit-il in fine) - peut-être la dernière, peut-être pas, avant une fin inéluctable.


En attendant, profitons donc de la musique de Prohom qui dès Comment lutter, affiche les clés de sa nouvelle alchimie : les paysages électroniques sont plus fouillés que jamais et les guitares ne viennent qu'à un moment donné, comme un appui qui permet de doubler l'intensité du morceau. C'est rudement bien pensé et bien produit (quand on pense à Stromae et son new beat pourri des années 80, on est là dans une bien autre dimension et dans un vrai son d'aujourd'hui). Cela permet à Prohom d'afficher une clarté dans son propos et dans sa voix : l'homme en impose sans avoir besoin d'en rajouter dans la violence ou la rage. Il est sûr de son fait. A bien des égards, Un Monde Pour Soi est un vrai album de chanson française (Madame Canaille répondant peut-être à la Madame X de Di Maggio), ayant parfaitement assimilé sa part de new wave ou d'indus. Ce côté rock à multi-facettes est désormais délivré en parfaite intelligente et donne dès lors une densité permanente à l'ensemble. Prohom peut dès lors bâtir un titre sur un riff minimaliste joué aux claviers. Il peut inviter en duo Carmen Maria, Vega et laisser parler sa fibre romantique sur une belle sérénade proche d'Autour de Lucie (Au coin des rues) ou reprendre définitivement le contrôle sur un dernier titre en forme de brûlot final électro-rock (Un Monde pour soi, dernière station avant Chemical Brothers) : Prohom apporte de l'élégance , là où il y a de la force et de la puissance, là où il y a de l'émotion. Un vrai disque de patron de la chanson française, à ranger aux côtés de Dominique A, de Murat et de quelques autres...

denizor
8
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le 14 avr. 2013

Critique lue 139 fois

2 j'aime

denizor

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