Et si en France, The Queen of Pop était un Prince ? Avec son quatrième album, Le Prince Miiaou franchit une nouvelle étape.
Je me demande si Maud-Elise Mandreau regrette parfois son nom d’artiste. Choisi à l’heure de son premier album, sorti tout droit de la chambre et de l’imaginaire d’une jeune fille, le Prince Miiaou ne rend pas forcément justice à la musique de la Française. Faîtes-le test et prononcez à quelqu’un qui ne connaît pas, le nom du « Prince Miiaou » : immanquablement, celui-ci esquissera un sourire un brin moqueur. La musique, elle, a cette faculté de souvent transformer cette perplexité amusée en surprise nettement plus valorisante : celle qui peut mettre sur le cul ceux qui découvrent la musique de la jeune femme. Encore faut-il passer outre le nom et la première impression qu’il peut laisser…
Finalement, Le Prince Miiaou, c’est notre star à nous ! Ce n’est évidemment pas la plus connue (donnée objective), ce n’est même pas forcément la plus talentueuse (donnée subjective) mais c’est une des seules qui a la « classe internationale ». Le concept, pour le moins tiré par les cheveux (que je me permets de vous exposer néanmoins), me fait dire que, dans un monde juste (même pas « parfait », juste « juste »), la petite Française de Charente-Maritime devrait se retrouver à faire des tournées mondiales, à remplir des salles gigantesques, à finir dans le David Letterman show, d’avoir une poupée à son effigie, que sais-je encore. Dans un combat singulier basé sur le talent, Maud-Elise ne ferait que du petit bois de Bat for Lashes (le matou princier plus fort que la chauve-souris à mèches, voilà qui est finalement logique). Et par moments, elle pourrait même se confronter à quelques Goliath féminins (Kate Bush, PJ Harvey, Bjork).
Il faut dire que la « petite » progresse. D’abord seule, Maud-Elise est aujourd’hui entourée d’un vrai groupe. Bien que toujours attachée à l’autoproduction, elle peut aussi s’appuyer sur le savoir-faire de son réalisateur/producteur Antoine Gaillet (M83, Arman Méliès) et niveau puissance sonore, Where is the Queen ? dépasse encore d’une tête le précédent Fill the Blank with your own emptyness. Happy song for empty people est un titre qui en impose, c’est le moins que l’on puisse dire. C’est une ouverture grand écran 3D pour un disque qui se veut plus rock que ses précédesseurs. Pourtant – et fort heureusement, si le disque ne fait pas dans le minimalisme (pas le style de Prince Miiaou), il arrive toujours à exprimer une sensibilité qui lui est propre, un vrai sens de la musique qui passe au travers des couches musicales. Ce n’est pas le gros machin indigeste, dégoulinant de sentimentalisme qu’il pourrait être, mais un objet tout en nuances, en harmonies contrastées qui affiche pourtant une force de chaque instant. Un disque ultra féminin qui a du souffle et des fêlure, à la fois direct et complexe. Il est classique, serti de singles imparables (avec des morceaux-étandards, country bliss, alaska) mais avide de sonorités et de recherches. Le Prince Miiaou reprend à son compte les expérimentations de voix d’une Kate Bush (Cristal haze ), et là où l’Anglaise samplait son père, la Française intègre la voix de sa grand-mère (beloved knife).
Au final, Where’s the Queen dure moins de quarante minutes, et il semble nettement plus long. Non pas parce qu’il est ennuyeux mais tout au contraire car il apparaît d’une richesse musicale considérable. Un constat d’autant plus intéressant que Le Prince Miiaou n’appartient à aucune chapelle : ni rock 70, ni prog, ni new wave, et un peu tout ça à la fois. La Française se joue des étiquettes. De quoi fédérer encore plus autour d’elle, sans pour autant tiédir son propos. La Classe Internationale, je vous dis !