Un jour d'hiver 1969, Neil Young reçoit la visite de son ami Dean Stockwell avec dans les mains un scénario de sa confection, appelé After The Goldrush. C’est une histoire de désastre écologique qui voit Topanga Canyon enseveli sous un raz-de-marée dévastateur. Pas très sûr de lui, Stockwell n’acheva son écriture que sous les encouragements hystériques de Dennis Hopper, qui depuis le succès d’Easy Rider s’est surtout appliqué à terroriser l’industrie hollywoodienne. Il est tout à fait permis de remettre en cause le jugement de Neil Young quand au potentiel d’un projet filmique au vu de sa propre carrière de réalisateur, il faut absolument voir la sidérante bande annonce de son Human Highway pour se rendre compte à quel point on aime Neil Young quand il chante et qu’il tient une guitare. En l’occurrence il est totalement conquit par l’histoire d’After The Goldrush qui lui inspire immédiatement l’album du même nom, qui est, autant le dire sans détour, un chef d’œuvre absolu. Le film ne verra jamais le jour, mais il nous reste ces onze pépites sublimes qui, en variant les plaisirs du rock’n’roll à la country, permettent presque d’établir une synthèse de la carrière du canadien. Le Crazy Horse est de la partie sur plusieurs titres, même si Danny Whitten, en proie à une terrible addiction à l’héroïne, n’apparaît que sur When You Dance. L’ouverture Tell Me Why est le meilleur morceau à écouter au réveil, croyez moi j’ai tout essayé et celui-là est absolument parfait. After The Goldrush, le morceau titre, est un solo de Young au piano, voix tremblante et haute perchée, qui ne laissera insensible que ceux qui ont de la mousse dans les oreilles, une remarque également valable pour les magnifiques Bird et I Believe In You. Le terrible Southern Man, une attaque frontale contre les états sudistes nostalgiques de l’époque ségrégationniste, demeurera culte pour avoir inspiré la réponse cinglante de Lynyrd Skynyrd avec Sweet Home Alabama. Quand à Don’t Let It Bring You Down, c’est une vision poétique d’un monde en mouvement et de quelques personnages désœuvrés, une perle ambigüe qui inquiète et rassure en un même mouvement.
Extrait du podcast Graine de Violence à découvrir ici :
Neil Young, se perdre et se retrouver
https://graine-de-violence.lepodcast.fr/neil-young-se-perdre-et-se-retrouver