Avec Programme, on connaît le programme, si j’ose dire. Un chant parlé sur une musique répétitive en partie improvisée entre bruitisme et indus. Programme, c’est un empêcheur de tourner en rond, la petite bête qui vous gratte dans le dos, un « hérisseur » de poil professionnel, une rage froide sur une musique clinique. Le groupe a su proposer des textes sociétaux qui, à la différence du hip hop tout venant, ne sont jamais ni premier degré ni démonstratif mais traduisent plutôt en filigrane le malaise diffus de nos sociétés. Des textes qui agressent sans être précisément agressif. Cela fait 10 ans que ça dure pour la paire Arnaud Michniak (chant) et Damien Bétous (machines, guitares) qui revient aux affaires après l’escapade solo du chanteur. Programme revient égal à lui-même et c’est peut-être là que le bas blesse : ce qui à l’origine provoquait trouble, vertige et électro-choc se transforme désormais en lassitude.
Il y a comme un train-train, ce qui peut-être le pire résultat pour des agitateurs. On relève un peu la tête sur Ce n’est pas ça : avec son climat jazz contemporain et les accents fiévreux de Michniak, il se passe quelque chose sur le morceau. Mais l’ensemble du disque ressemble à une triste litanie. On pourrait se poser la question dès lors de la date de péremption d’une musique aussi radicale et construite sur un postulat et des ingrédients aussi minimalistes. Et se dire que le groupe l’a peut-être atteinte, sur disque en tout cas. Sur scène, dans un dispositif scénique plus global, la force du Programme peut être intacte. Le duo doit peut-être réfléchir à d’autres formats, à d’autres moyens d’expression…ou faire évoluer sa musique sur disque. En attendant, Programme devient la caricature de lui-même sur l’interminablement abscons Nous. Demandez le Programme ! Non plus vraiment…