Que se passe-t-il quand une jeune journaliste politique, fan de punk, dub et pop 60’s rencontre les deux membres de Beak > (dont Geoff Portishead Barrow) ? Les deux Anglais sont passés maître en claviers analogiques à tel point que l’on pourrait croire qu'ils pensent vivre encore au milieu des années 70 en pleine période krautrock. Cette rencontre ne pouvait donner qu’un premier album bizarrement fagoté composé de chansons easy listening pas vraiment faciles d’écoute (comme le dit si bien la bio). En tout cas, le disque ne caresse pas dans le sens du poil et se révèle plus grinçant que charmant. Rien ne tourne vraiment rond chez Anika et les mélodies semblent être chantées par une jeune femme au mieux endormie, au pire éméchée. Autre exemple, le dub de master of war et de no's one there semblent avancer sur une roue voilée. L’important ici ne réside pas dans le fond, les mélodies rappellent au mieux Nico, au moins bien Dalida (end of the world), mais dans le traitement musical à base de sons de claviers plastiques, de rythmiques minimalistes et de guitares bancales.
Ce qui est encore plus intéressant, c’est justement ce décalage entre un fond gentillet et une forme au final un peu malsaine. Rappelant la musique glaçante de PIL, ce disque est plus punk dans son esprit que tous les disques actuels de guitares agressives joués par de blanc becs boutonneux. Dès lors, la reprise I go to sleep ne ressemble ni à l’original des Kinks, ni à la version célèbre des Pretenders : le morceau a la parfum décadent d'un cabaret berlinois d'avant le Mur. L’exotisme de Yang Yang ressemble un peu à une douche froide mais le groove roublard du morceau reste la meilleure réussite de l'album. Le disque est donc intéressant mais un peu lassant à la longue. Peut-être parce que nous sommes plus en 1975. Ce travail de remise à plat et de basculement des codes n’est aujourd’hui plus aussi pertinent.