Biophilia c’est avant tout un concept. Un projet multimédia qui permettrait d’intriquer la musique, le cosmique, l’atomique et la nature. A la fois le nom d’une application iPad et un titre d’album regroupant des chansons. Ouf ! Et le tout vendu par une islandaise qui porte choucroute rouge et vêtements new-age. Bref, avec ce look curieux, ces discours et contenu hermétiques, on ne peut s’empêcher de penser que Björk a viré gourou. Mais qu’est-ce que la diva a bien voulu faire ?
N’ayant pas d’iPad à portée de main pour tester ladite application, on se contentera de juger « l’album » Biophilia en espérant que l’on ne nous en voudra pas trop de l’isoler de son concept. Mais dans la mesure où toute cette hyper-communication autour de Biophilia a de quoi dérouter (mais pourquoi insister dans chaque interview sur le fait que les instruments ont été créés par l’application, mais pourquoi une telle moumoute ?) il est impossible de s’en détacher en écoutant les chansons. C’est le premier effet gourou, on est hypnotisé par les apparences, les beaux discours auxquels on ne comprend pas grand-chose.
Et l’on est d’autant plus hypnotisé lorsqu’on est accueilli, morceau après morceau, par des sons mutins, doux, délicats (harpe, orgue, chœurs) et des mélodies infantiles tant elles sont simples. Biophilia se veut hospitalier. Mais en vérité c’est un disque qui met mal à l’aise, ennuie : chaque chanson s’étire inutilement sur plusieurs minutes sans autres fils conducteurs que de jolis sons égrainant une suite de notes sans nuances. Tout est éclaté, tout semble gratuit, de ces mélodies sans liant jusqu’aux vocalises irritantes, car trop libres, de Björk. On est dans le non comprendo le plus complet, et c’est là le deuxième effet gourou.
A ce stade, deux issues sont possibles. Soit l’on se plonge corps et âme dans ce labyrinthe en espérant en sortir grandi, soit, à bout de forces (et d’écoutes), on finit par conclure que sous ses airs compliqués, son charabia musical, ce nouveau disque ressemble plutôt à une petite coquille vide dans laquelle on a jeté des idées sans prendre le soin de les assembler. C’est le troisième effet gourou : en fonction de son passif, on reste ou on part. Et nous, en l’occurrence, nous avons dit non à la quête transcendantale, comme diraient Les Inconnus.