Automne 2016, je ne fais qu'écouter "Blonde". Il est sorti fin août mais je n'sais pas, à ce moment là, l'été qui était encore là, une première écoute qui m'avait un peu perdu, l'inévitable comparaison avec "Channel Orange"...
Tout cela a repousser les réécoutes.
Maintenant, nous sommes fin octobre, j'ai 38 ans, une vie équilibrée, épanouie. Mais je viens de perdre mon ami d'enfance. Depuis le collège nous étions de vrais amis, vous savez, cet ami qui t'a vu pleurer pour une fille, qui t'a vu gerber lamentablement tes Whiskys/coca dans les rues d'ta ville à 5 heures du mat. Celui avec qui tu t'es battu, avec qui tu t'es réconcilié un nombre incalculable de fois. Celui qui d'un regard te comprenait, celui avec qui tu as découvert les albums qui ont changé ta vie.
"Blonde" a été le premier album que je n'ai pu partager avec lui. Analyser les sons dans une voiture sur les hauteurs de l'Ardèche en se faisant passer un spliff lourdement chargé et se regarder en écarquillant les yeux quand une chanson nous retournait le cerveau.
C'est pour cela que "Blonde" a une saveur particulière pour moi.
Et il a fallu que ça tombe, justement, sur cet album introspectif, nostalgique et captivant.
Ce chef-d'œuvre.
"Blonde" est un album qui parle du temps qui passe, du changement, de l'évolution, du passage à la vie d'adulte, de renaissance.
C'est un album sur le retour sur nos années passées, remplies d'amour et de sexe, de drogues et de voitures, d'amis et de famille, et qui se confronte à la personne que ces années ont fait de vous.
Frank est vraiment quelqu'un de spécial. Son chant déborde toujours d'humanité qui fait de lui une voix unique en son genre. Sa musique semble totalement incomparable et indépendante du genre. "Blonde" c'est du chant et du rap, de la guitare acoustique et des cordes d'orchestre, des beats et des orgues d'église, mais "Blonde" sonne toujours comme Frank Ocean. Et bien que les mélodies ici ne soient pas aussi immédiates que celles de "Channel ORANGE", il y a suffisamment de moments déchirants pour vous convaincre de faire le voyage avec Frank. Les larmes de "Self-Control", les "Nights" hypnotiques et changeants de forme, l'intégralité de "White Ferrari" - même à la première écoute, ces chansons sont captivantes et palpitantes et chacune a des moments de puissance et de beauté. Avec Frank Ocean, rien ne semble jamais formulé ou superficiel.
Non seulement Frank résume parfaitement l'aspect identitaire de tout, mais aussi les tentations et les changements que vous ressentez avec le temps. Les idées du jeune amour, comment ce temps commence à passer de plus en plus vite. Comment votre vie peut devenir si trépidante une nuit et comment vous devez y faire face le lendemain. Ou sur la façon dont nous, en tant que personnes, sommes devenus déconnectés du fait des médias, des réseaux sociaux. L'histoire de Facebook est un intermède bref mais important. Surtout étant donné que c'est un réel problème chez les jeunes, aujourd'hui.
Je ne me souviens pas combien de fois j'ai été surpris tard dans la nuit à pleurer sur cet album. Lors d'une promenade estivale, à penser aux décisions d'une vie.
J'aime tellement à quel point "Blonde" est révélateur d'un temps qu'on ne peut ignorer sentir traverser. Les humeurs, les émotions, l'anxiété, mais, aussi, le sentiment stimulant de résilience.
Avec "Blonde", Frank Ocean a réalisé son deuxième chef-d'œuvre, un joyau Dream-pop-R&B-alternative et a réaffirmé sa place d'auteur-compositeur-interprète la plus vitale et la plus généreuse sur le plan émotionnel de sa génération. Son approche de la musique établit un niveau de confiance et d'intimité avec l'auditeur qui ne ressemble à rien d'autre dans la musique d'aujourd'hui. On a l'impression de grandir à ses côtés.
Sa voix empathique et ses paroles fait de Franck Ocean un compagnon bienvenu dans notre propre chemin de vie.
"Blonde" est ce dont le monde avait besoin.
"Living so the last night feels like a past life"... #Blonde
10/10