Non, nous ne sommes pas en 1970. Nous sommes bien en 2014, Lana Del Rey nous berce d’une douce Ultraviolence, Coldplay continue de nous casser les oreilles avec ses histoires de fantômes et Blues Pills sort son premier album au titre éponyme.
44 ans que Janis Joplin est décédée d’une overdose, à 27 ans comme tant d’autres. Son oeuvre reste intemporelle. Son album Cheap Thrills avec Big Brother & the Holding Compagny est toujours efficace et parvient encore à émouvoir des "jeunes" comme moi (comment résister à Summertime ?) Il y avait à cette époque quelque chose de spontané, de pur, une énergie folle qu’il suffisait de laisser exploser dans un mouvement de liesse générale. C’était une de ces périodes folles, d’un optimisme créatif sans bornes. Les nostalgiques hippies finiront par dire que les années 80 ont tout foutu en l’air. Il faut peut-être les croire, alors que le maniérisme et l’auto-tune sont de plus en plus à l’honneur aujourd’hui (mais n’exagérons rien !) Ils seront comblés ici, tant Blues Pills nous fait revivre cette époque à jamais révolue.
Nombreux sont les groupes de revival ces dernières années qui, face à une impasse musicale et culturelle, décident de remonter le temps. Les très célèbres Black Keys avaient mené la marche jusqu’à tomber dans une pop plus convenue, les allemands de Kadavar distillent un rock-heavy metal blacksabbathien lourd et hypnotique. Mais les Blues Pills tiennent quelque chose de plus authentique et véritable à mon goût.
Des pilules bleues pour faire bander un rock papy qui aimerait retrouver les sensations de sa jeunesse. Des pilules bleues pour faire bander un auditeur las de tout. Le blues rock de Blues Pills a quelque chose d’éminemment sexuel, physique. Les rythmes nous prennent tout entier, la guitare lyrique nous émeut, tantôt douce, tantôt furieuse, et cette voix !!! cette voix joplinienne qui a le don de transmettre des émotions brutes et sincères, cette voix d’une puissance incroyable, qui murmure, caresse et s’égosille jusqu’à nous filer la chair de poule ! Les années 70 et leur vitalité débordante, on y est, en plein dedans. Ca fait années 70, oui, mais ça ne fait pas plagiat pour autant. Ca fait Joplin, ça fait un peu Led Zeppelin, oui, mais il y a ce quelque chose, il y a "la touche" Blues Pills qui fait de leur son quelque chose d’immédiatement reconnaissable.
Pour évoquer un peu plus l’album, je dirais qu’il a l’immense avantage de ne pas être répétitif. Dix morceaux seulement, mais pas ce sentiment qu’on peut avoir à la première écoute d’entendre dix fois la même chanson. On se laisse entraîner dans des morceaux puissants aux structures énigmatiques. On se laisse doucement surprendre par des solos de guitare grandioses, par une voix qui emplit l’espace et c’est vite fini. Entre-temps on aura eu quelques frissons et le désir d’en redemander. Pour mes gros coups de cœur : Ain’t no change est un bon morceau rock bien efficace, Little sun clôt l’album sur une ballade hard-rock sensible et intense. Mais n’allez pas croire qu’il faille jeter le reste. Rien n’est à jeter. On démarre sur les chapeaux de roue et on ne nous lâche pas jusqu’à la fin.
Derrière tout cela, il y a deux américains, un jeune guitariste virtuose français à peine majeur, et une suédoise plutôt canon aux longs cheveux dorés. Il suffit de voir un de leurs lives pour être bluffé par le charisme exceptionnel de cette femme fatale survoltée. Côté homme, le look est très Led Zeppelinien : des longs cheveux bouclés, des fringues qui font d’époque, côté femme, on continue l’assimilation Janis Joplin avec des longs cheveux détachés et des robes amples. Preuve supplémentaire de leur volonté de recréer une époque. On pourrait aussi évoquer à ce titre la pochette de l’album absolument magnifique, du Mucha aux couleurs très vives sur lequel apparaît un logo à l’écriture 60-70’s. Pour tout vous avouer, c’est d’ailleurs uniquement pour l’artwork que j’ai décidé de jeter une oreille à ce disque. Et quelle bonne surprise !
Un excellent album en somme. Le meilleur que j’ai pu entendre depuis un bon moment ! Le meilleur album 2014 à mon goût pour le moment. Pour l’anecdote, je me suis empressé d’acheter leur album sur Internet, juste après l’avoir écouté intégralement sur deezer. Qu’est-ce que ça fait du bien de pouvoir découvrir de nouveaux groupes comme ça ! En espérant qu’ils continuent sur cette lancée et puissent aller loin, car ils le méritent, c’est indéniable. Soutenez-les ! Bref, chapeau bas !
L'article sur mon blog : http://lhommeauchapeau.wordpress.com/2014/08/08/blues-pills/