Et si le grand artiste belge, c'était lui ! David Bartholomé, entouré de ses deux fidèles acolytes, forment avec Sharko l'un des trios les plus séduisants de la planète pop. Et cela fait 10 ans que ça dure !
Dance on the beast, sixième opus de ce que l'on est bien obligé d'appeler une oeuvre, est fidèle à ses prédécesseurs : alerte, inventif et réjouissant. Sur un format de chanson de 3'-3'30 (sa durée-étalon), Sharko arrive à concentrer un cocktail vitaminé de mélodies pop imparables. Le rêve du programmateur radio qui n'aura que l'embarras du choix pour exporter de l'album des singles potentiels.
Il y a là des titres naturellement solaires (Rise up), ils ne sont pas majoritaires sur l'album, loin de là . En passant dans d'autres mains que ces Belges farceurs, l'essentiel de Dance on the beast aurait pu avoir des accents déchirants. Il en reste d'ailleurs des exemples : 23 find we belong est à vous tirer des larmes. Il faut dire que les ingrédients sont là : une voix d'écorché, sorte de Sting de fin de soirée (et donc plus éraillé) et un fond qui renvoie à la base plus à la new wave sombre des années 80 ou à l'indie rock dépressive des années 90 qu'au Club Dorothée
.
Sauf qu'avec Sharko, cela ne se passe pas ainsi : un petit vent d'allégresse combat sans cesse les idées noires et parfois les repoussent très loin. Peut-être que le nom de l'album vient de là : menacés d'être dévorés tout cru par la bête de la déprime, Bartholomé et ses hommes préfèrent danser dessus dans un dernier sursaut de vitalité. Horses est en soi un bon exemple de cette positive attitude de chaque instant qui fait mettre au milieu d'un morceau indie rock en mode mineur un inattendu petit gimmick de claviers Bontempi à la Jacno.
Et ne croyez que le principe soit artificiel : au contraire, ces ingrédients contraires se fondent dans un même et bon morceau. Sharko ferait même passer un élément de mauvais goût (comme une guitare rock FM à la Van Halen sur Cinema Tech) pour une idée de génie. Délicieux retournement de situation et apanage des plus grands.
Avec Sharko, ça groove et plus vite que ça à coups de synthé basse parfaitement assumé : Yo Hear, formidable titre de funk blanc dans la lignée de Zoot Woman, peut nous faire croire que Bruxelles se trouve pas dans la banlieue de L.A. et que David, dans les tréfonds de son arbre généalogique, a un peu de sang black. Dans le genre, le californien Since You called est pas mal non plus et vous donne envie d'être Chic et de porter le costard blanc. Comme Beck, Luscious Jackson, Phoenix, Zoot Woman et d'autres, le trio belge se révèle parfaitement à l'aise entre culture musicale blanche et black. Complément indispensables des guitares, la partie électronique chez Sharko a le côté vintage des années 80 : une nécessité technique à l'époque, un vrai choix esthétique aujourd'hui avec des sons francs du collier et des programmations hip hop premières époques.
Pour son album, le trio belge a fait une nouvelle fois appel à Dimitri Tikovoi, un producteur au final plus à l'aise quand il s'agit de travailler pour les autres (Michael J. Sheehy, Ghinzu, The Raveonettes) que pour lui-même (Trash Palace, projet pour le moins lourdingue).
Carton plein sur toute la ligne. Sharko, l'artiste qu'il vous faut.