Premier et dernier album de Silencer, groupe ayant accueilli le bassiste et guitariste "Leere" également connu pour son apparition au sein du groupe "Shining" ainsi que le batteur de session "Steve Wolz" quand à lui connu au sein du groupe "Bethlehem". Nattramn assure les vocaux avec son chant unique. Une seule demo déjà bien prometteuse du même nom que cet album engendrée en 1998 composait la discographie du groupe.
Au premier abord, la pochette de l'album paraît particulièrement sinistre, mystérieuse et semble pour le moins abstraite. Un personnage en proie à la folie contemple son reflet, affrontant les fantômes et les spectres de sa vie maudite. Son visage se dédoublant évoque une personalité schizophrène. Les visages suspects cachés dans les recoins de la pièce soulignent le caractère fou et paranoïaque de l'individu. L'auditeur est donc invité à contempler le miroir qui reflétera sa vie en cauchemar et qui n'est pas sans rappeler des thèmes chers au groupe "Xasthur" avec des titres tels que "This Abyss Holds the Mirror'" ou encore "A Gate Through Bloodstained Mirrors". Notons également que le logo du groupe est très moderne, metallique et médical; ce qui accentue le coté dérangé et fou de l'oeuvre.
L'album commence là ou a commencé la première demo, c'est à dire avec le premier titre "Death - Pierce Me". L'album composé de 6 tracks est donc une prolongation de la demo constituée de cette unique chanson. Elle démarre par quelques notes mélancoliques avant que le chant de Nattramn ne vienne déchirer le placenta calme et réconfortant mis en place pendant ces 2 minutes de sérénité. Dès lors c'est une chute démente qui s'amorce ne trouvant sa fin qu'en de sinistres notes au piano. Les cris sont suraiguës, torturés et ôtent toute joie de vivre. Les rares moments de répit illusoire et de calme inquiétant sont soudainement coupés par les hurlements de terreur de Nattramn. Nul doute que les auditeurs non avertis et habitués aux derniers "Dimmu Borgir" finiront l'écoute par une crise cardiaque.
L'écoute s'enchaîne aussitôt avec "Sterile Nails And Thunderbowels" véritable hymne en l'honneur de la souffrance dont le clip est composé d'extraits de l'excellent film "Begotten'". Le riff du départ est d'une nostalgie rare. Le rythme est plutôt lent, mais ô combien maladif ! La deuxième minute de la chanson démarre en ce que je considère l'un des hurlements les plus torturés du genre. L'intensité de la voix de Natramn monte et redescend successivement avant de s'achever en des gargouillements pathétiques. Les crachotements et les nausées deviennent des exhortations au suicide clôturant la chanson sous la bannière de la mort.
Le titre résumant l'album est le suivant "Taklamakan". On y retrouve de très bons riffs ainsi qu'un matraquage en règle à la batterie . Le rythme ne s'arrête jamais rendant le style de la chanson plutôt académique mais terriblement efficace. Le tout s'achève sur les jubilations maniaques de Nattramn comme si ce dernier essayait de s'échapper de sa fosse macabre.
La chanson la moins intéressante de l'album est sans doute "The slow kill in the cold" même si elle demeure remarquable. Elle débute sur un air froid et clinique m'évoquant le regard hagard et nostalgique d'un insensé imaginant le monde au delà de sa cellule psychiatrique. La chanson continue de la même manière que "Taklamakan" entrecoupée par moment par les paroles impersonelles d'un homme sur un enregistrement grésillant me faisant penser à une expérience de transcommunication.
L'avant dernier track "I Shall Lead, You Shall Follow" démarre inéxorablement. Le rythme est des plus immodérés avant de s'arrêter sur les plaintes mélodiques, seraines et enivrantes de Nattramn. L'auditeur se sent glisser vers la folie lorsque ce dernier brise une fois de plus l'atmosphère consolatrice par ses hurlements maniaques qui rivaliseraient d'horreur avec ceux d'un pendu se jetant dans le vide, la corde autour du cou.
Enfin l'album s'achève sur "Feeble Are You - Sons of Sion". Titre au piano inquiétant nous donnant l'impression d'assister aux funérailles de l'esprit torturé à l'origine de cet album dantesque.
Au final, l'auditeur se retrouve épuisé, fébrile et reclus dans les affres de la folie vomie à travers cette oeuvre.
"Death - Pierce Me" est sûrement l'album de Suicidal Black Metal le plus extravagant et taré de toute l'histoire du genre. Je place très haut ce chef d'oeuvre de désespoir et d'épouvante que certains écouteront à leurs risques et périls.