Désolé pour le titre de la critique, j'ai pas pu m'empêcher. Pour le reste, je voudrais en guise d'introduction dire bravo et merci (ou plutôt "mersea", comme il l'écrit souvent lui-même) à Michel Polnareff. "Bravo" car il est parvenu, avec son nouvel album qu'on attendait plus, à me donner envie d'écrire ma première critique depuis plus de deux ans (et c'est d'autant plus étonnant que l'opus en question n'a rien de bien exceptionnel en soi). Le "mersea" découle donc du "bravo" (oui, moi aussi je sais faire des jeux de mots aquatiques pourris). Pour moi aussi, finalement, c'est un "grand retour".
Mais rentrons dans le vif du sujet. Comme 90% des amateurs de musique de l'hexagone, j'étais évidemment très sceptique à l'annonce de l'arrivée imminente de ce disque, une véritable arlésienne. Imaginez un peu : le dernier single que j'avais vraiment apprécié de Polnareff, c'était Je rêve d'un monde, sorti en 1999. Autant dire une éternité. En 2007, le "Re Tour" de l'icône aux lunettes blanches m'avait par contre laissé un goût un peu amer, tant je trouvais que les Etats-unis nous l'avaient changé (pour ne pas dire "beaufifié") en une sorte de caricature bodybuildée de notre Johnny national (avec tout l'arsenal qui va avec, comme les apparitions dans la presse à scandales). Disons que j'avais bien du mal à reconnaître celui qui, dans les années 60 et 70, était capable d'écrire de véritables bijoux sensibles et poignants. Pour en revenir au présent, faut avouer aussi qu'avec une telle pochette, on se tire direct une balle dans le pied non ? Sûr que si je cherche un peu sur Fotolia, je retrouve la photo du cadenas !
Bon bref, musicalement, qu'est-ce que ça donne ? Eh bien figurez-vous que pour moi, on est quand même loin du désastre annoncé, et l'on pourrait même appeler ça une bonne surprise. Onze pistes, dont deux (longs) instrumentaux en ouverture et en conclusion, juste sympas mais très maîtrisés techniquement, que ce soit au niveau des compos ou de la production. Tout au long de l'écoute, on aura de toute façon davantage l'impression d'avoir affaire à une B.O. de film (exercice coutumier de "L'Amiral") qu'à un album dit "classique", tant les textes semblent mis au second plan par rapport à la musique. Certains pointeront ici un manque flagrant d'inspiration, et il n'auront pas tout à fait tort (Polnareff s'en amuse d'ailleurs gentiment dans Longtime... qui est, paradoxalement, un des meilleurs titres). Terre happy, par exemple, c'est vrai que ça ne vole pas haut du tout, si l'on compare à ses anciennes chansons.
Dans l'ensemble, il est évident que ce disque est, de toute manière, complètement déphasé par rapport à la production musicale actuelle, d'où ce sentiment de "ringardise" qui revient souvent dans les critiques. Peu de piano finalement, pour beaucoup de gros rock à la papa comme on en fait plus depuis vingt ans (Positions faisant figure d'exception avec ses accents jazzy). Oui, mais sauf que c'est bien fait, et ça on ne peut pas le nier ! Enfin est même, comme je le disais plus haut, un album surprenant, assez enlevé, rythmé (Sumi, Louka's song, L'homme en rouge et Ophélie flagrant des lits, toujours convaincante dans cette version revisitée). On ne pourra évidemment que regretter que l'aspect émotionnel qui caractérisait la musique de Polnareff il y a quarante ans ait été un peu sacrifié sur l'autel de la technique, mais mélodiquement, pas de doute, la flamme est encore là. Des textes plus sérieux (ou plus réfléchis, comme vous voulez) auraient sans doute davantage rendu justice aux compos, toutes plaisantes, sans qu'aucune ne fasse vraiment mouche et n'atteigne la magnificence d'un Nos mots d'amour ou la puissance d'un Tam tam - l'homme préhisto. Mais comme je n'ai pas envie de terminer sur un bémol, je vous conseille d'ajouter cet album "dans votre playlist" de fin d'année... Ou au moins d'y jeter une oreille, juste pour vous rendre compte qu'il n'y a finalement que l'artwork qui est vraiment mauvais là-dedans !