Programmée cette année au toujours recommandable festival "Les Femmes s'emmêlent", Leah Hayes - alias Scary Mansion - ne va pas manquer de faire parler d'elle. Cette fille du Massassuchetts, francophile pour avoir participé avec David-Ivar Herman Dune (pour le projet Satan 's Finger), déjà remarquée aux côtés de TV on The Radio, est une nouvelle preuve de la vitalité de la scène féminine américaine. Fille naturelle de Cat Power et de Scout Niblett, elle n'a pas totalement usurpé le "Scary" (effrayant en français) de son pseudo, son album étant un poil flippant dans ses détails, quand on se plonge Captain donne le ton d'une artiste écorchée aux mélodies rugueuses. En même temps, ce titre placé en ouverture nous induit presque en erreur car Every joke... n'est pas toujours fait de cette même énergie tordue qui rue dans les brancards. Les moments suivants sont plus calmes, parfois presque arythmiques. Mais de petits éléments viennent toujours tirés les morceaux du côté du malaise : derrière cette folk music traditionnelle jouée parfois par un vieil instrument originaire des Appalaches, il y a toujours quelque chose qui cloche, une légère translation vers un regard biaisé et une folie latente : la voix chaotique (très proche de celle de Chan Marshall) y est pour beaucoup mais aussi quelques instruments grinçants, d'autres qui résonnent, une batterie syncopée, un orgue qui dresse un écran de fumée sous nos pieds, un piano déglinguée et une prise de son qui semble avoir été capté sur le vif. Les morceaux ne semblent vouloir avancer qu'au bon vouloir de son interprète, volontiers paresseuse, largement lunatique. Ce qui nous vaut de beaux moments (Shame, sharkish idea) et même une visite dans un chanteau hanté au temps du muet ( Yer mom). A fleur de peau, Scary Mansion touche parfois à la grâce mais celle-ci semble avoir été quelques peu salie par la boue. Il s'agit peut-être là la face sombre de l'immaculée Alela Diane. Leah nous dit Go to hell, on y va volontiers avec elle