L'ascension de Ross From Friends s'est faite aussi naturellement que rapidement. Comme si Felix Clary Weatherall voulait être ce meme auquel on devient rapidement accro (et accessoirement qu'on voit partout). Mais celui-là ne mourra pas au bout de quelques semaines pour finir dans un calendrier des memes 2018.
À l'heure où la lo-fi house envahit de sombres (ou pas) playlists sur youtube, la musique du londonien arrive à pic. Talk To Me You'll Understand synthétise parfaitement cette mouvance underground de la musique électronique, à mi-chemin entre l'envie de danser seul dans la nuit et celle d'avoir une dépression adolescente (parce que ça fait très Tumblr c'est sympa).
Là où Ross From Friends aurait pu sortir des projets qui se fondent dans la masse de cette tendance aux relents de weed dans un appart' de hipster, le compositeur a rapidement prouvé une certaine technicité à travers une série d'EPs chez Lobster Theremin et Breaker Breaker par exemple...
Son arrivée chez Brainfeeder n'est presque pas étonnante, Aphelion EP annonçait déjà la couleur de l'album qui mijotait chez FlyLo : une composition ultra technique servant un son abstrait et mélancolique.
Family Portrait fait éclater toute la créativité de Ross From Friends, tout est millimétré et en même temps extrêmement fluide comme pour un musicien qui aurait pondu son chef-d'œuvre après des années de travail. Apparemment le compositeur doit beaucoup de ce talent à son père à qui il rend hommage plusieurs fois dans cet album. Plutôt utile de faire le hippie dans un soundtruck en parcourant l'Europe au final.
L'album balance parfaitement entre technicité sans prise de tête et musicalité sans émotion simpliste. Don't Wake Dad (il doit être en descente là) illustre bien ce cocktail parfaitement dosé, une mélodie très profonde se dégage du rythme glitché à plusieurs reprises. Family Portrait se révèle aussi être un compromis techno-IDM très pertinent, Thank God I'm A Lizard provoque une obsession pour le rythme dès le début de l'album. En plus d'être original, ce morceau fait rentrer l'auditeur directement dans l'univers synthétique et vaporeux de Ross From Friends.
Tout ce voyage artificiel semble prendre place dans un passé pas si lointain (en même temps avec un nom pareil), la mélancolie d'une enfance sans prétention, mais d'une enfance quand même. On croirait presque que les intentions du disque font écho à la vaporwave et son désir de modeler le futur avec nostalgie. Ross From Friends se sert de ce passé pour créer une musique actuelle.
Beaucoup de risques sont pris, différents styles sont explorés sans jamais que l'album ne perde du sens. Quand on sait que le premier EP du bonhomme remonte à seulement quelques années, malgré un passé musical conséquent, on ne peut que saluer, et dans mon cas aduler, Family Portrait.