Fun House
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Fun House

Album de The Stooges (1970)

Au bout de la nuit un Iguane torse nue, levi's moulant et flamenco boots descend les rues de Detroit, totalement défoncé, il lèche les visages luisants des passants par unique plaisir de déclencher la panique. Il est l’antéchrist, il est l'anarchiste, il veut tout détruire. Pour l'éclate. Ron Asheton, en uniforme-nazi-qui-fait-peur et ray-ban aviator, riffe face au mur, dans l'espoir de le faire éclater et d'en laisser jaillir un magma éléctrique qui dévastera tout sur son passage. Son frère Scott tabasse ses fûts dans une ruelle sombre pour maintenir le taux d'adrénaline du gang à son maximum.
Parce que c'est un lâche l'Ig' s'en va cracher son venin, bien profond, sur le conformisme rock. Il prend d'assaut radios et maisons de disques, propulsé méchamment par la musique roller-coaster de son backing band, persuadé d'avoir écrit un tube. Porté par la foule Iggy triomphant s'enduit le corps de peanut-butter.
En plein death trip, il flippe total sur une gonze qui le prend pour une star de prime time et ne le lâche plus des yeux ! Seul dans son coin, Ron invente un rock insalubre, celui du futur, à grand coups de guitare poisseuse. Une bombe à retardement qui recouvrira les murs de brique d'un son fuligineux. L'univers arc-en-ciel des bab' étouffera bientôt dans le noir-et-blanc punk. Don « Louie Louie » Galluci, le crétin des Kingsmen, hurle à l'incendie depuis la cabine d'enregistrement. Il ne sait plus quoi faire. Ses larbins sont incontrôlables.
Toute leur saleté se repend, la ville est à feu et à sang. C'est au tour de Dave Alexander et de Scott Asheton d'assurer. Il faut calmer le jeu, avancer vers le but précis du groupe : l'asile d’aliénés. Ils appuient sur les fréquences basses et maintiennent un rythme implacable. La foule marche au pas. Pendant ce temps Ron et Iggy se livre à des incantations vaudou à base de feulements et de pédale wah-wah, pour libérer des esprits vicieux de leur tombes.

L'année est 1970. 69 année érotique, tout ça c'est fini. « No fun for my babe » disait la chanson, maintenant c'est « I feel alright », phrase favorite de tous ceux qui ne tournent pas rond. Les Stooges balancent ce qu'il leur reste de rationalisme pop, avant l'intervention soudaine et salvatrice du saxo deus ex machina de Steve McKay, qui ne se taira plus jusqu'à la fin.
Les portes de l'asile sont maintenant ouvertes. Ils les ont fracassées. Bienvenue dans la fun house. Les freaks sortent et partent dans tous les sens, le petit musée des horreurs prend le pouvoir et ça va chier !
Le blues de L.A. éjacule enfin sa cacophonie malsaine. James le brun et fier, Sanders le pharaon du jazz libre, Jimi le sauvage de Monterey et la « Sister Ray » de velours jamment dans le ranch de la Manson Family. Disons que les Stooges se transforment en quelque chose qui ressemble à ça. En vrai il n'y a pas de précédent à une telle furie !
Rien à voir avec les putes angelinas du gros barbu et pseudo poète. Le cavalier sous la tempête qui rend l'âme dans sa baignoire ? Laissez moi rire. Que Brecht lui montre la voie vers le prochain bar à Whisky de l'autre coté de la route du blues et qu'ils nous foutent la paix. Fuck 'em all.
La tension retombée, votre gueule se ramasse contre le sol. Atterrissage douloureux. Vos oreilles en saignent encore.

Les Stooges c'est la version démoniaque des Doors. Ils ont osé nous emmener droit en enfer et leur train fantôme c'est le plus grand album de tous les temps. Ce n'est pas encore cette bonasse callipyge et attrayante à la puissance brut, celle fagotée comme une bitch par le Ziggy Stardust. « Fun House » s'aborde plus délicatement. Il est plus insidieux. On y va d'abord à reculons, puis on comprend que c'est l’œuvre qui doit venir vers vous et non l'inverse. Un peu comme avec toute œuvre d'art moderne.
Lancez le disque sur la platine et vous verrez, toute la pièce se repeint d'elle-même aux couleurs rouge-orangé de son infernale pochette. Votre esprit aussi.
Fuck yeah !
MeRz
10
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le 7 nov. 2013

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