Le Siecle sera sous antidépresseurs... Ou ne sera pas
2012.
Nous avions laissé Fuzati prier pour la stérilisation du monde entier dans un grand élan de haine et de solidarité morbide.
Le rappeur masqué enfonçait le clou du pessimisme et du broyage de noir en milieu tempéré avec le sublime "La fin de l'espèce" du Klub des Loosers après la superbe surprise du premier album ("Vive la vie").
Ces deux albums-concepts avaient claqué le museau des tenants du Rap Français.
Exit les "bihatchs" à gros culs et les galères de banlieue, fini le difficile chemin pavé de douilles encore fumantes de fusil à pompe, oublié le fil ténu où tu marches en équilibre entre une Kalachnikov et une seringue d'héro.
Le Rap "Frenchie" s'endormait sur les seins lourds de prostiputes bon marché, laissant glisser de leurs mains moite un flingue venant s'écraser sur un reste de pizza froide.
Fuzati reléguait le gros dur plein de coke et de tatouages sur le siège arrière et faisait de son "Yeah-ya" ridicule une blague Carambar.
Déboulant avec son Rap "P'tit Bourgeois" Versaillais, relevant le niveau de notre Hip-Hop national à grands coups de discours anxiogène et d'auto-flagellation.
Des textes sombres mis en lumière par Detect et ses samples inspirés.
2014.
Nous retrouvons Fuz' dans un projet solo. Exit le Klub des loosers place à Fuzati...et Orgasmic aux platines.
Orgasmic: DJ historique du "KDL" passé chez TTC, puis titillant l'électro sur les labels de Teki Latex, revient à la maison retrouver son vieux pote masqué pour un projet alléchant.
"Grand Siècle" est le nom du projet de ces deux grands noms du Hip-Hop Underground Français.
Dès le premier morceau, on comprend que l'on n'est pas dans le "KDL".
La finesse du sample et la virtuosité des scratchs de Détect ne sont plus là, place à une prod' plus lourde moins aérienne. Une basse caverneuse qui fait vibrer le gras de ton bide, des cuivres hurlants, des pianos sous tranxènes.
Une production différente mais loin d'être mauvaise, une originalité évidente malgré une "Deep Bass" trop présente qui "standardise" un peu les morceaux.
Fuzati reste fidèle à lui-même et sa joie de vivre qui ferait passer Robert Smith pour l'auteur de "Tirelipimpon sur le Chihuahua" est toujours le point central de ses textes.
Les punch-lines sont ultra-efficaces et claquent fort sur le cul d'une jeunesse décérébrée.
Fuzati continue de cracher à la gueule de tout le monde et s'épargne un peu cette fois-ci. Sa plume reste toujours une des plus belles du Rap Français, une plume superbe mais dangereuse, empoisonnée.
Une plume trempée dans un mélange malsain de Prozac, d'humour noir et de talent brut.
"Assis au fond du bar j'attends que se détruisent les hommes
Ils sont tous terre-à-terre, j'écris depuis le planétarium
Et les étoiles entre elles me disent que tu n'es rien
Tu ne brilleras pas après ta mort parce que tu vis déjà éteint"
http://www.youtube.com/watch?v=oYwIoHtE3Kk