Ressenti publié dans le cadre de mon classement intégral de la discographie de David Bowie, composée de 26 albums studio.
Numéro 9 : Heroes
Fin 1977, après un premier album et un qu'il a totalement produit pour Iggy Pop, Bowie sort son deuxième album solo de l'année. Une surproductivité et une créativité qui seront non seulement des moments clés dans les carrières des deux artistes, mais qui auront aussi un impact considérable dans le paysage musical. En effet, ces albums sont souvent considérés comme les premiers pas véritables de la musique cold-wave. Je ne suis pas historien et je laisse les plus pointilleux d'entre vous me reprendre si besoin.
Toujours accompagné de Visconti et de l'essentiel Brian Eno, cet album, comme la trilogie dans laquelle il s'inscrit, rentreront dans la postérité. S'il n'est pas autant cité que son prédécesseur Low, il détient ce que l'album à la couleur orangée n'a pas, à savoir un single qui deviendra avec le temps l'une des chansons les plus connues du catalogue du chanteur.
L'album s'ouvre avec "Beauty And The Beast", une chanson dansante expérimentale au son robotique et au rythme endiablé. S'il a fallu donner du temps pour que je puisse totalement apprécier pleinement ce titre, c'est désormais chose faite, pour mon plus grand plaisir. Transitionnant superbement avec le prochain titre "Joe the Lion", la fougue de l'album dans ce chaos électronique ne me laisse pas indifférent et ce titre est déjà le paroxysme de l'énergie palpable de ce début de projet. S'ensuit le morceau éponyme que nous ne pouvons présenter à personne, je dis bien à personne. Présente dans tellement de films et souvent de manière si maladroite ou grossière que oui, j'ose le dire, ce titre n'était initialement pas une évidence pour moi. Il n'y a que les cons qui ne changent pas d'avis et très clairement si je dois en être un ce ne sera pas lié à mon avis sur cette chanson, magnifique ballade s'étirant dans le temps et dans ses sonorités grisâtres et futuristes. Après ce gros et grand morceau, l'album va doucement mais sûrement ralentir le tempo avec des titres très sympathiques qui maintiennent le projet dans une cohérence musicale indéniable. Le très bon "Sons Of The Silent Age" suivi du vraiment appréciable "The Blackout" et du fortement sympathique "V-2 Schneider" forment ce que je considère comme une deuxième partie de l'album. Une deuxième partie sous forme d'intermède qui ne rivalise pas avec la première mais qui en garde la cohérence et qui servira de transition au dernier segment de l'album, le dernier de ces trois morceaux ressemblant d'ailleurs assez à un interlude. Que dire de ce dernier acte. Génial, tout simplement, comme l'était celui de Low. Car oui, Bowie a totalement repris la même structure que son album précédent, avec une première partie chanté et une deuxième instrumentale, où tout le savoir faire de Brian Eno est superbement exprimé. Que ce soit le si lancinant "Sens Of Doubt", le ô combien stellaire "Moss Garden" ou le génialement horrifique "Neuköln", cette partie d'album renvoie à l'imaginaire. Il n'y a qu'à fermer les yeux et imaginer. C'est superbement incarné et palpable et si l'ambiance est aux antipodes de la première partie, les deux se complètent parfaitement, comme le premier opus de cette merveilleuse trilogie. L'album avait donc tout pour être une petite perfection, hélas, il ne s'est pas arrêté quand il fallait. Il a fallu qu'un seul titre pour casser la dynamique finale du projet. "The Secret Life Of Arabia" est le moins bon titre de l'album, mais pire que ça, n'a rien à faire dans cette position là. Pourquoi finir l'album avec cela alors que tout semblait parfaitement conclu avec la partie instrumentale? Un véritable mystère et pour ma part, une vraie faute de goût.
Il n'en reste pas moins que Heroes est un très grand titre et si la popularité du titre éponyme peut permettre à plus de gens de découvrir l'album dans son intégralité, alors il y a de quoi se réjouir. Pourtant, cette chanson tant connue est probablement la moins expérimentale dans un album qui pourrait décontenancé mais qui, selon moi, à tout de même de quoi être facile d'écoute pour beaucoup. S'il n'est pas à mes yeux le plus grand chefs-d'œuvre, de par certains titres fortement sympathiques mais pas à tomber par terre pendant des jours et une fin décevante, l'album a tellement une ambiance propre à lui-même (bien que l'on y retrouve pas mal de The Idiot, déjà totalement produit par Bowie) et réussit si bien ce qu'il entreprend qu'il n'en reste pas moins un bon petit chefs-d'œuvre tout de même. Dire que ce n'est pas le meilleur album de David Bowie sortie cette année-là..