Humbug
7.1
Humbug

Album de Arctic Monkeys (2009)

Avec le recul, on peut percevoir à quel point Humbug fut un album de liaison. Il est le chaînon entre Favourite Worst Nightmare et Suck it and See. Un disque qui est forcément plus mature. Sous l'influence de Josh Homme, les Arctic Monkeys abandonnent l'aspect rock garage pour se tourner vers le stoner. Le changement est brutal, la surprise fut au rendez-vous. L'album est plus doux globalement, il n'oublie pas une réelle énergie pour autant, mais il surprend par les choix de sonorité, lorgnant entre stoner et rock'n'roll à l'ancienne. On voit également une réelle envie de creuser les textes, Humbug est peut être le plus aboutit de ce point de vue.


Réel bijou de sensibilité, de musicalité, d'esthétique, Humbug est un album moins accessible que Favourite Worst Nightmare, c'est un disque exigeant pour son public qui demande plusieurs écoutes et de creuser pour le comprendre, mais il n'est pas prétentieux pour autant et se veut accessible dans les premières écoutes. Il a une musicalité qui veut être comprise, des ambiances faciles pour déjà apprécier les morceaux, mais il faudra un travail pour les apprécier pleinement.


Le disque commence par le morceau le plus faible finalement : My Propeller, qui annonce directement le changement de sonorité mais reste très classique par bien des aspects. Morceau agréable, mais pas incroyable. Il précède, au contraire, le temps le plus fort de l'album avec Crying Lightning : une rythmique absolument sexy, une guitare aérienne et dure en même temps, un chant qui ose se poser de manière virevoltante, une sonorité intuable et des paroles qui montrent tout l'aspect contemplatif et éthéré de Humbug. Du grand génie !
Dangerous Animal propose une lourdeur propre, à la fois le côté lourd du Stoner et en même temps un aspect bien plus vivant, le son britannique rock-punk du groupe en somme. On a un groove sombre, rock, on a une réelle profondeur, Turner nous livre ici son génie de poète en ne cherchant pas à compter fleurette avec aisance. Typique de ce nouveau son.
Secret Door vient en contre-point avec une petite ballade magique, très délicate mais très magique avec un refrain efficace et un couplet dansant et sensuel à souhait. Un titre parfait où la rythmique et les guitares sont totalement opposés mais fusionnent avec efficacité. Là encore les paroles sont séduisantes.


Comme pour s'opposer à cette lenteur et douceur, le groupe enchaine avec le terriblement puissant et efficace Potion Approaching, on a un rythme rapide, énergique, et un refrain qui repose sur les choeurs et la batterie. Encore une fois on retrouve le phrasé spécial de Turner, son art du verbe et sa maîtrise du tempo. Le titre a un côté revival de l'ancien Arctic Monkeys remis au goût du jour par le nouveau. Le tout avec des paroles d'amours et de sexe dans le pur style imagé de Turner, très intelligente comme écriture, très vivante et sonnant juste malgré les très nombreuses images.
Fire and the Thud arrive ensuite, s'annonçant doucement avec une petite guitare et quelques voix dans un esprit de douce approche typique d'Humbug. Un titre peu agressif, mais là encore inquiétant, l'aspect stoner se fait ressentir ainsi dans ce qui serait une ballade de QotSA quelque part. Un triste morceau d'adieu.
Cornerstone reste une ballade, mais ici plus joyeuse, plus optimiste avec des paroles que j'adore. Un homme erre de bar en bar, trouvant toujours des femmes qui lui rappellent son ex. Il les séduit mais finit toujours par vouloir les appeler par le prénom de la femme perdue. Une histoire qui parvient à osciller entre tendresse et léger humour sans jamais tomber dans le bateau grâce au talent d'écriture d'un Alex Turner véritable poète du rock britannique.


Dance Little Liar ouvre la dernière partie de l'album. Les paroles sont ici relativement claire, étonnamment, avec une invitation à la sincérité. Le morceau pourrait n'être qu'une ballade de plus s'il n'y avait pas le mixage et surtout la batterie qui anime le morceau d'une vie nouvelle.
Après une introduction au synthé presque religieuse, Pretty Visitor prend un rythme diablement rapide qui plaira aux amoureux de Favourite Worst Nightmare. Et cela n'est pas anodin puisque le morceau critique par avance les fans qui renieront le groupe suite à ce changement musical qu'est Humbug. Le groupe sait jouer des styles pour servir son message. De plus la batterie possède une réelle mise en avant nous permettant de nous rappeler du talent de Matt Helders. Un titre excellent, d'une puissance folle montrant toute la puissance du groupe, son génie, son talent, sa force, sa fougue, son humour, son énergie et sa noirceur.
Le disque se termine par un gentil et joyeux The Jeweller's hand. C'est doux, gentil, assez anecdotique il faut le dire même si un sentiment de nostalgie s'en échappe quand même. La fin est cependant très bien faite et est affreusement plaisante.


Les Arctic Monkeys proposent un disque incroyablement différent de ce qu'ils faisaient jusque là. Ils prouvent ainsi leur grande capacité à se réinventer. Ils prouvent ainsi qu'ils sortent de la catégorie des groupes qui font vite le tour d'eux-mêmes. A la différence d'autres formations, Arctic Monkeys n'a pas inventé un son puis a fini et se répète inlassablement, cet album fut la première preuve de la grande capacité de renouveau du groupe.
On remarquera que l'album ne possède que peu de pistes, la preuve aussi que pour eux, il vaut mieux la qualité à la quantité. Un disque d'exception, un beau travail d'un des plus grands groupes de rock.

mavhoc
8
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le 9 mai 2018

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